Homélie pour le Dimanche XVII, année B (Jn 6, 1-15).
Ce dimanche la liturgie nous présente le miracle de la multiplication de pains et de poissons, et comme nous l’avons proclamé, le passage correspond à l’évangéliste saint Jean, dans le chapitre 6 de son évangile, que nous allons continuer à suivre pour quelques dimanches, car après d’avoir décrit le miracle, saint Jean nous transmet tout un long discours de Jésus, appelé le discours du Pain de Vie, où, à partir de ce miracle le Seigneur parlera de la réalité du sacrement de l’Eucharistie. Nous allons profiter aujourd’hui et des dimanches qui suivent pour réfléchir à différents aspects de la Sainte Messe, le lieu et le moment où l’Eglise réalise le Sacrifice Eucharistique, où le Seigneur s’offre encore une fois et nous permet de le recevoir dans cet auguste Sacrement de son Corps et de son Sang.

Faisons, d’abord, un petit commentaire du miracle pour parler après de notre participation à la Messe.
Cet évangile est la continuation historique du moment raconté par saint Marc que nous avons médité la semaine dernière : « Jésus vit une grande foule. Il fut saisi de compassion envers eux, parce qu’ils étaient comme des brebis sans berger ». Après les avoir enseigné, Jésus propose de leur donner à manger et réalise ce miracle.
Remarquons premièrement d’après saint Jean, qu’au moment du miracle, la fête de la Pâque était proche, et que c’est à la Pâque que le Seigneur instituera le Sacrifice Eucharistique à la veille de son immolation sur la Croix. En effet, les gestes qu’il fait dans ce miracle : « Alors Jésus prit les pains et, après avoir rendu grâce, il les distribua », seront ceux qu’Il accomplira le jeudi saint de sa Vie au moment de consacrer le Pain et de donner l’Eucharistie à ses apôtres.
Le miracle nous révèle aussi la surabondance de biens spirituels, il restera douze paniers. Mais que le Seigneur fait rassembler avec une finalité : « pour que rien ne se perde ».
Cette consigne de Jésus aux disciples contient en elle-même l’ordre de revenir à la valeur de ce pain qui a nourri la multitude, il est le fruit d’un miracle. Ramasser les morceaux est une opération qui demande beaucoup de soin et surtout une reconnaissance de sa valeur. Ces restes sont l’image matérielle du fait que toute grâce accordée par le Seigneur ne se mesure pas selon la capacité d’accueil de l’homme, puisqu’elle la dépasse sans mesure.

« Ce n’est point par vaine ostentation que le Sauveur commande de recueillir ces restes, nous enseigne saint Jean Chrysostome, mais pour bien établir la réalité du miracle. Mais pourquoi charge-t-il ses disciples plutôt que la foule, de recueillir ces restes ? parce qu’il voulait instruire surtout ceux qui devaient être les maîtres du monde entier. Quant à moi, j’admire non seulement la multiplication des pains, mais le soin avec lequel l’Évangéliste mentionne le nombre précis de corbeilles. Il y avait cinq pains, et Jésus-Christ dispose le tout de manière à ce que les restes ne remplissent que douze corbeilles, ni plus ni moins autant qu’il y avait d’Apôtres. » S. Chrys. (hom. 42), Catena Aurea.
Prenant cette image, ce soin par rapport aux restes de la nourriture donnée par miracle nous allons parler de la participation à la Sainte Messe. Si nous participons chaque semaine ou chaque jour à ce miracle de l’Eucharistie, nous devons « prendre soin » de ces choses sacrées auxquelles Dieu nous donne la grâce de participer. « Prendre soin » veut dire réfléchir sur l’importance de nous préparer pour la messe et pour la communion, le désir de mieux participer à la messe, d’approfondir dans les signes, dans les gestes et dans les paroles, enfin dans le grand mystère de la foi qui est l’Eucharistie.
Parlant précisément de la façon de célébrer la messe par rapport aux prêtres, Saint Jean Paul II faisait aussi référence à la participation des fidèles : « Le culte eucharistique s’approfondit et croît quand les paroles de la prière eucharistique, spécialement celles de la consécration, sont prononcées, avec grande humilité et grande simplicité, de façon compréhensible, correspondant à leur sainteté, et d’une manière belle et digne ; quand cet acte essentiel de la liturgie eucharistique est accompli sans hâte ; il conduit à une dévotion et à un recueillement tels que les participants découvrent la grandeur du mystère qui se réalise, et qu’ils le manifestent par leur comportement. » (Dominicae Cenae) C’est-à-dire, que dans la célébration eucharistique chacun des participants et évidement le prêtre qui célèbre accomplit un rôle essentiel, tout d’abord celui qui a été institué par l’ordre du sacerdoce ministériel à présider la célébration en union avec chaque baptisé, qui possède le sacerdoce baptismal et offre spirituellement ce sacrifice.
C’est cette participation à la messe que l’Eglise demande lorsque le magistère nous dit : « La Mère Église désire beaucoup que tous les fidèles soient amenés à cette participation pleine, consciente et active aux célébrations liturgiques, qui est demandée par la nature de la liturgie elle-même et qui, en vertu de son baptême, est un droit et un devoir pour le peuple chrétien, « race élue, sacerdoce royal, nation sainte, peuple racheté »

« La participation pleine, explique le saint pape, Jean Paul II,signifie certainement que tous les membres de la communauté ont un rôle à jouer dans la liturgie. Mais la pleine participation ne veut pas dire que tout le monde peut tout faire, car cela conduirait à cléricaliser les laïcs et à séculariser le sacerdoce ; et ce n’est pas l’intention du Concile Vatican II. La liturgie, comme l’Église, doit être hiérarchisée et « polyphonique », respectant les divers rôles assignés par le Christ et permettant à toutes les voix différentes de se fonder sur un seul grand hymne de louange ». (Discours 9/10/98)
Faisant une comparaison avec le miracle de la multiplication des pains, ce n’est pas à tout le monde que le Christ ordonne de ramasser les morceaux sinon à ses disciples, ses apôtres.
Ecoutons encore les paroles du pape Jean Paul II : « La participation active signifie évidemment que, par des gestes, des paroles, des chants et des services, tous les membres de la communauté prennent part à un acte de culte qui n’est nullement inerte ou passif. Cependant, la participation active n’exclut pas la passivité active du silence, de la quiétude et de l’écoute : en fait, elle l’exige. Les fidèles ne sont pas passifs, par exemple, lorsqu’ils écoutent les lectures ou l’homélie, ou lorsqu’ils suivent les prières du célébrant et les chants et la musique de la liturgie. Ce sont des expériences de silence et de quiétude, mais elles sont aussi très actives à leur manière. Dans une culture qui n’encourage pas la quiétude méditative, l’art de l’écoute intérieure est plus difficile à apprendre. Nous voyons ici comment la liturgie, bien qu’elle doive toujours être suffisamment acculturée (résultat de l’inculturation), doit aussi être contre-culturelle » (lorsque la culture a été corrompue par le péché). (Discours 9/10/98)
Que devons-nous faire de notre part pour mieux participer à la messe, quelles dispositions sont nécessaires pour assister à la messe ?
Pour obtenir cette pleine efficacité (de sanctification avec la participation à la Sainte Messe), il est nécessaire que les fidèles accèdent à la liturgie avec les dispositions d’une âme droite, qu’ils harmonisent leur âme avec leur voix, et qu’ils coopèrent à la grâce d’en haut pour ne pas recevoir celle-ci en vain. C’est pourquoi les pasteurs doivent être attentifs à ce que dans l’action liturgique, non seulement on observe les lois d’une célébration valide et licite, mais aussi à ce que les fidèles participent à celle-ci de façon consciente, active et fructueuse.

A ce titre, le Saint Padre Pio de Pietrelcina nous enseigne : «La messe est infinie comme Jésus… demandez à un ange ce qu’est la messe et il vous répondra : ‘je comprends vraiment ce que c’est et pourquoi elle est offerte, mais je ne peux pas comprendre la profondeur de sa valeur’. Un ange, mille anges, tout le ciel savent cela et ils pensent comme ça ».
Parce que la Messe a une valeur infinie, elle est, peut-on dire, « incommensurable » par la compréhension humaine. Par conséquent, en même temps, la moindre connaissance que nous ayons d’elle, si grande soit sa valeur, donne à l’âme une sublime perfection.
Que la très sainte Vierge Marie nous aide à mieux participer chaque jour de la Sainte Messe.
P. Luis Martinez IVE.