“Prie, ou Dieu t’accordera ce que tu lui demandes ou bien ce qui est meilleur pour toi”

Homélie pour le Dimanche XVII, année C (Lc. 11, 1-13)

« Seigneur, apprends-nous à prier » demandent les apôtres, et le Seigneur leur donne la prière du Notre Père. Voyant Jésus recueilli en prière, un peu à l’écart, totalement immergé dans ce dialogue avec le Père, ses disciples désirent avoir la même prière, ils veulent prier comme leur maître. Jésus ne fit aucune objection, il ne parla pas de formules étranges ou ésotériques mais avec une grande simplicité, déclara : « Quand vous priez, dites : “Notre Père…” », et il leur enseigna le Notre Père (cf. Lc 11, 2-4), qu’il tira de sa propre prière, celle avec laquelle il s’adressait à Dieu, son Père.

La prière du Notre Père est un résumé admirable de tout ce que nous devons demander à Dieu, c’est une prière sublime.

Parmi toutes les prières, le Notre Père occupe manifestement la place principale. Selon Saint Thomas d’Aquin, elle possède les cinq qualités excellentes, requises pour la prière (Commentaire du Notre Père).

Celle-ci doit être a) confiante, b) droite, c) ordonnée, d) dévote et e) humble.

a) La prière doit être confiante. Toute prière doit procéder d’une foi sans défaillance.

Pour plusieurs raisons, le Notre Père est la prière la plus sûre, la plus confiante.

Elle est l’œuvre de notre avocat, du plus sage des orants, du possesseur de tous les trésors de la sagesse (cf. Col 2, 3), c’est-à-dire de Notre Seigneur ; en effet, saint Jean a dit de Jésus(1 Jean 2, 1) : « Nous avons près du Père un avocat, Jésus-Christ le Juste ».  Saint Cyprien écrit dans son traité de l’oraison dominicale (le Notre Père) : « Comme nous avons le Christ comme avocat auprès du Père pour nos péchés, dans nos demandes de pardon pour nos fautes, présentons en notre faveur les paroles de notre avocat. »

Nous avons encore un autre motif : Celui qui, avec son Père, écoute favorablement cette prière, est le même qui nous l’a enseignée. « C’est faire au Seigneur une prière amie, familière et dévote, dit saint Cyprien, que de s’adresser à lui en reprenant ses propres paroles. »

En faisant notre prière avec confiance nous obtenions toujours quelque fruit, et, selon saint Augustin, par elle Dieu remet les péchés véniels.

b) Notre prière doit, en second lieu, être droite, c’est-à-dire qu’elle doit nous faire demander à Dieu les biens qui nous conviennent. « La prière, dit saint Jean Damascène, est la demande à Dieu des dons qu’il convient de solliciter.»

Fort souvent, la prière n’est pas exaucée pour avoir imploré des biens qui ne nous conviennent pas vraiment. « Vous demandez et vous ne recevez pas, dit saint Jacques (4, 3), parce que vous demandez mal ».

Il est bien difficile de savoir avec certitude ce qu’il faut demander.

Les biens que Jésus nous a appris à demander dans la prière du Notre Père, il est donc très convenable et très sage de les demander. « Si nous prions d’une manière juste et convenable, dit saint Augustin, quels que soient les termes que nous utilisons, nous ne disons rien d’autre que ce qui est contenu dans cette Oraison dominicale (Prière du Seigneur). »

c) En troisième lieu, la prière doit être ordonnée et réglée, comme le désir lui-même, dont la prière est l’expression

L’ordre convenable consiste en ce que nous préférions dans nos désirs et nos prières les biens spirituels aux biens corporels, les réalités célestes aux réalités terrestres, conformément à la recommandation du Seigneur (Mt 6, 33) : Cherchez premièrement le royaume de Dieu et sa justice ; et le reste – le manger, le boire et le vivre – vous seront donnés par surcroît.

Dans l’oraison dominicale, le Seigneur nous a appris à observer cet ordre. On y demande en effet d’abord les réalités célestes et ensuite les biens terrestres.

d) La prière, en quatrième lieu, doit être fervente( faite avec dévotion).

La prolixité, c’est-à-dire, l’abondance de paroles et de décor dans la prière, le plus souvent, affaiblit la dévotion ; aussi le Seigneur nous enseigne à éviter cette prolixité superflue. « Dans vos prières, dit-il (Mt 6, 7), ne multipliez pas les paroles, comme font les païens ». Saint Augustin écrivant à Proba, dit aussi : « Bannissez de la prière l’abondance des paroles ; cependant ne manquez pas, si votre attention demeure fervente, de beaucoup supplier. »

Telle est la raison pour laquelle le Seigneur institua cette brève prière du Notre Père.

La dévotion vient de la charité, qui est inséparablement amour de Dieu et du prochain.

Cette prière du Notre Père est une manifestation de ces deux amours. Pour montrer en effet notre amour à Dieu, nous l’appelons « Père », et pour signifier notre amour pour le prochain, nous prions pour tous les hommes ensemble, en disant : notre Père, et poussés par le même amour, nous ajoutons : remettez-nous nos offenses.

e) Notre oraison doit, en cinquième lieu, être humble, suivant cette parole du Psalmiste (Ps. 101, 18) : Dieu a regardé la prière des humbles.

Une prière humble est une prière sûrement exaucée. Le Seigneur nous le montre dans l’évangile du Pharisien et du Publicain (Luc 18,9-15).

Cette humilité est pratiquée dans l’Oraison dominicale, car la véritable humilité existe lorsque quelqu’un n’attend que de la puissance divine que tout ce qu’il en doit obtenir.

Dieu nous écoute-t-il?

Nous allons nous concentrer ce dimanche sur un aspect qui est parfois le plus difficile à comprendre, il s’agit de la réalisation de ce que nous demandons dans notre prière, ou bien en le posant d’une manière négative et comme une question : pour quoi Dieu n’exauce pas parfois nos supplications ?

D’abord, écoutons l’enseignement du Catéchisme de l’Eglise Catholique : « Sommes-nous convaincus que ” nous ne savons que demander pour prier comme il faut ” (Rm 8, 26) ? Demandons-nous à Dieu ” les biens convenables ” ? Notre Père sait bien ce qu’il nous faut, avant que nous le lui demandions (cf. Mt 6, 8) mais il attend notre demande parce que la dignité de ses enfants est dans leur liberté. ” Vous ne possédez pas parce que vous ne demandez pas. Vous demandez et ne recevez pas parce que vous demandez mal, afin de dépenser pour vos passions ” (Jc 4, 2-3 ; cf. tout le contexte Jc 4, 1-10 ; 1, 5-8 ; 5, 16). Si nous demandons avec un cœur partagé, ” adultère “, c’est-à-dire qui n’est pas fidèle à Dieu, (Jc 4, 4), Dieu ne peut nous exaucer, car il veut notre bien, notre vie. »  

Nous devons nous demander donc, si vraiment ce que nous demandons est en accord avec ce que Dieu veut pour nous, si c’est en accord avec Sa Volonté, Il ne peut pas nous accorder ce que notre désir cherche en rapport avec la convoitise de la chair, des richesses et de l’orgueil.

Selon Saint Augustin, « si nos prières sont parfois non exaucées, c’est que nous demandons aut mali, aut male, aut mala : « aut mali », en étant (nous) mauvais, et pas assez préparés pour demander ; « aut male », nous demandons mal, d’une mauvaise manière, avec peu de foi ou sans persévérance, ou avec peu d’humilité ; « aut mala », nous demandons des choses mauvaises, ou qui, pour une raison ou une autre, ne nous conviendront pas” (La Cité de Dieu, 20, 22).

Mais nous constatons que dans notre vie, nous avons demandé des choses qui étaient bonnes en elles-mêmes, nous les avons implorées pour nous ou pour d’autres personnes… pour quoi Dieu ne les a t’elles pas accordées?

Il faut d’abord savoir, nous dit saint Thomas d’Aquin qu’il y a certaines choses qui peuvent mal tourner (avec le temps) et qu’on peut bien ou mal utiliser ; ainsi les richesses (demandées licitement et de façon ordonnée) ont été parfois la ruine de bien des gens ; les honneurs, qui en ont perdu un grand nombre ; les règnes, dont on voit l’issue souvent misérable ; les alliances splendides, qui plus d’une fois, détruisent les familles ». C’est Dieu donc qui, dans sa Providence et pour notre salut éternel, nous épargne cela.

En effet, comme a dit un grand théologien, le père Antonin Dalmace Sertillanges, « Dieu aide parfois sans aider », c’est-à-dire, qu’Il ne donne pas ce qu’on lui demande pour que cela ne devienne pas ensuite un obstacle pour accomplir sa sainte Volonté. Saint Augustin enseigne aussi : « Ou Dieu t’accordera ce que tu lui demandes ou bien ce qui est meilleur pour toi ».

Cela exige de nous un regard de foi, croire que ce que Dieu ne me donne pas aujourd’hui, ou bien qu’Il ne m’accordera jamais, c’est parce que dans Sa Sainte Volonté, Il le sait meilleur pour moi et pour mon salut. Cela restera caché dans le mystère de sa Providence et nous connaîtrons la raison pour laquelle Il n’a pas fait ce que nous lui avons demandé, peut-être seulement au Ciel. Comme Dieu le dit par le prophète Isaïe : « Autant le ciel est élevé au-dessus de la terre, autant mes chemins sont élevés au-dessus de vos chemins, et mes pensées, au-dessus de vos pensées ». (Is 55, 9)

« Quel père parmi vous, quand son fils lui demande un poisson, lui donnera un serpent au lieu du poisson ? » Dieu ne peut pas nous faire du mal éternellement, s’Il le permet dans cette vie c’est pour ne pas nous perdre dans l’Eternité.

Saint François de Borgia était un homme très chrétien, marié à 19 ans, il a élevé 8 enfants avec son épouse, il appartenait à la noblesse espagnole. Lorsque François eut 36 ans, son épouse tomba gravement malade et saint François commença à implorer avec une totale confiance la guérison de sa bien-aimée. Jusqu’au jour où le Seigneur lui apparut et lui dit : «  Je te donne ce que tu me demande, la guérison de ton épouse, mais je t’avertis que cela ne convient ni à toi, ni à elle ». Le saint a donc accepté avec générosité la volonté de Dieu et son épouse est décédée quelques jours après.

Il devait quitter ensuite la noblesse pour se faire religieux et prêtre, Dieu l’appelait à devenir un grand prédicateur et à guider l’ordre des jésuites comme son supérieur général, et c’était cela son chemin de sanctification.

Pour conclure, nous ne devons jamais abandonner la prière, au contraire, nous devons continuer sans cesse à frapper la porte de son Cœur pour qu’Il nous écoute.

« Mais jusqu’à quand doit-on prier ? , dit saint Alphonse de Ligurie, Toujours, jusqu’à ce que nous recevions la sentence favorable du salut éternel, c’est-à-dire jusqu’à la mort : « Ne t’arrête pas, continue-t-il, tant que tu n’as pas reçu ! ». “Celui qui se dit: je ne cesserai pas de prier, tant que je ne serai pas sauvé, celui-là est sûr de son salut: « Si tu dis : je ne me retirerai pas avant d’avoir reçu, tu recevras certainement ». L’Apôtre Paul écrit: « Beaucoup courent après la récompense mais un seul la reçoit, celui qui réussit à la saisir: « Ne savez-vous pas que, dans les courses du stade, tous courent mais un seul obtient le prix ? Courez donc de manière à le remporter! ».

Notre Dame a été appelée la Toute-Puissance Suppliante par Saint Alphonse et d’autres saints de l’Eglise, car Elle peut tout obtenir de Dieu par ses prières. Nous demandons à Marie de nous apprendre à prier comme son Fils l’a appris à ses apôtres.

P. Luis Martinez IVE.

“Toi, pars, et annonce le règne de Dieu!”

Homélie pour le Dimanche XIII C (Lc 9, 51-62)

Nous reprenons aujourd’hui les dimanches du temps ordinaire, dans les évangiles de ces dimanches nous écoutons les différents épisodes de la vie de notre Seigneur, sa vie publique après le baptême jusqu’au moment où le Christ entre en Jérusalem pour sa Passion.

Cette année nous méditons surtout l’évangile de saint Luc. Précisément le texte de ce dimanche débute alors que Jésus se dirige vers Jérusalem, Il prend la résolution de faire pour la dernière fois le chemin vers la Cité Sainte où Il subira sa Passion et sa mort : « Comme s’accomplissait le temps où il allait être enlevé au ciel, Jésus, le visage déterminé, prit la route de Jérusalem. » Saint Luc utilise l’expression « le visage déterminé » pour dire que la détermination de Jésus est aussi visible dans son visage, Il est compénétré, une « sainte obsession » pour accomplir ce que son Père lui demandait.

Mais ce qui suit dans l’évangile est un peu difficile à entendre et comprendre. D’abord, le refus d’un peuple d’accueillir le Seigneur et ensuite ces trois dialogues où Jésus montre les dures exigences pour le suivre.

Le fait que l’Esprit Saint ait voulu que ces trois moments soient racontés simultanément porte évidement un grand enseignement pour nous.

D’abord, Jésus prend la résolution d’aller vers Jérusalem, passant par la Samarie qui était depuis longtemps un peuple ennemi du peuple d’Israël. Pour annoncer sa venue, Il envoie des messagers devant lui ; mais ce peuple ne veut pas recevoir le Seigneur. Ecoutons l’interprétation que fait de ce texte, saint Cyrille de Jérusalem :

« Le Sauveur, qui connaissait toutes choses avant leur accomplissement, savait bien que ceux qu’il envoyait, ne seraient pas reçus par les Samaritains ; il leur commande cependant d’aller annoncer sa venue, parce qu’il agissait toujours dans l’intérêt de ses disciples. »

Il se rendait à Jérusalem aux approches de sa passion, c’est donc pour leur épargner le scandale de ses souffrances, et leur apprendre à supporter patiemment les outrages, qu’il permit ce refus des Samaritains, comme une espèce de prélude à ce qu’il devait souffrir. Il leur donnait encore une autre leçon, ils étaient destinés à être un jour les docteurs de tout l’univers, et devaient parcourir les villes et les bourgades pour y prêcher l’Évangile, et ils devaient nécessairement rencontrer des hommes qui refuseraient de recevoir cette sainte doctrine, et ne permettraient pas à Jésus de demeurer au milieu d’eux.

Il leur apprend donc, qu’en annonçant cette divine doctrine, ils doivent se montrer pleins de patience et de douceur, fuir tout sentiment de haine et de colère, et ne jamais chercher à sévir contre ceux qui les outrageraient ».

En effet, quelques années plus tard, après la Pentecôte, le peuple de Samarie sera l’un des premiers à se convertir au christianisme. Les Actes des Apôtres nous disent que ce sera le même apôtre Jean, qui veut maintenant faire tomber du feu du ciel, celui qui ira confirmer les samaritains venus au christianisme. Jésus a voulu faire tomber le feu dans ce monde, c’est le pouvoir de l’Esprit Saint, pour faire cela, il fallait mourir sur la croix. Le feu de Dieu n’est pas un feu de destruction, il donnera la vie, transformera les cœurs.

L’évangile nous décrit ensuite les dialogues avec ces trois hommes pour venir rejoindre le groupe des disciples.

Le premier s’offre spontanément : « Je te suivrai partout où tu iras ». La réponse de Jésus est absolument honnête et réelle, il ne décore pas la réalité, il ne veut pas non plus de fausses illusions. Son conseil était finalement : « Avant de devenir mon disciple, considère bien ce que cela va te coûter.

Suivre le Christ suppose un détachement à toutes les choses. Non seulement matérielles, mais, ce qui est le plus difficile, à celles d’ordre spirituel : l’amour propre, la recherche des honneurs de ce monde, la reconnaissance, le pouvoir ; renoncer à l’envie de possession, à la vanité, à l’ambition, au désir d’être reconnu et applaudi par les autres. Abandonner  ses propres critères (« Les renards ont leurs terriers, les oiseaux du ciel ont leurs nids ») pour imiter en tout le Seigneur, Il n’a rien de ce monde, tout ce que Jésus possède est du Ciel.

Le deuxième cas part d’une invitation du Seigneur, l’homme demande un temps : « Seigneur, permets-moi d’aller d’abord enterrer mon père. » Dans la façon de parler du temps de Jésus, ce que cet homme demandait c’était plutôt de rester auprès de son père jusqu’à la mort de celui-ci et pouvoir gérer pendant ce temps les affaires, que tout soit bien ordonné au moment où il quittera sa maison pour le suivre.

Mais qui sait le moment où cela arrivera ? Dans ce futur indéterminé, cet homme aura t’il toujours la même force de volonté pour suivre le Christ ? On voit clairement que la réponse doit avoir une priorité et demande un don total de soi-même. Il ne suffit pas d’une partie de moi-même, d’une partie de mon temps et de ma volonté, le Christ demande un amour qui soit avec tout le cœur.

La réponse de l’amour est aussi immédiate, nous ne pouvons pas reporter, on ne fait pas un calcul pour dire ensuite : « Oui, je veux te suivre, bien sûr, mais maintenant c’est difficile pour moi, je dois faire ceci ou cela ». Parce qu’on peut laisser échapper l’instant de sa vie et perdre, précisément à cause de la prudence humaine, le plus authentique de sa propre vie, la volonté de Dieu, pour ne jamais la récupérer après. Jésus nous fait remarquer qu’en tout, il y a un moment crucial, si l’on laisse passer l’opportunité sans la saisir, il est très probable qu’elle ne revienne jamais. Cet homme sentait dans le cœur l’appel à sortir de cette ambiance spirituellement morte : « laisse les morts enterrer leurs morts », « laisse de penser que la vie se limite aux lois et aux principes de ce monde », l’homme qui risque ce moment, ne sortira probablement jamais. 

La demande du troisième est aussi humainement raisonnable, il demande d’aller dire « adieu », mais on comprend qu’il s’agit aussi de mettre en ordre les affaires de famille. Le Seigneur lui dit : « j’ai besoin entièrement de toi » il n’y a pas de demi-journée au service de Dieu, ni moins encore, demi cœur dans son amour. L’homme se donne tout entier, et non, une partie de son temps et de ses biens. 

La charrue palestinienne au temps de Jésus était très difficile à guider. Cela exigeait une force totale dans le travail, il fallait affronter les efforts que cela demandait, renoncer à la commodité d’avoir une assurance de repos, car le travail risquait de ne pas être fini. Ainsi, le service de Dieu demande un cœur détaché sans division, un cœur consacré à ce à quoi il a été appelé. C’est un don total dans la pensée et dans l’amour, sans divisions, surtout sans tiédeur. 

« Je connais tes actions, dit Jésus dans l’Apocalypse, je sais que tu n’es ni froid ni brûlant – mieux vaudrait que tu sois ou froid ou brûlant. Aussi, puisque tu es tiède – ni brûlant ni froid – je vais te vomir de ma bouche ».

Pour conclure, l’évangile de ce dimanche ainsi que la deuxième lecture nous montrent l’importance de vivre la liberté comme chrétiens, une liberté authentique. Au début de l’évangile nous voyons la liberté du Seigneur dans ce “résolument” qu’il a pour se diriger vers Jérusalem. Il sait en effet que la mort sur la croix l’attend à Jérusalem mais, par obéissance à la volonté de son Père, il se donne lui-même par amour. C’est à travers son obéissance au Père que Jésus réalise sa propre liberté comme choix conscient motivé par l’amour. Qui est plus libre que Lui, qui est le Tout-puissant ? Cependant, il n’a pas vécu sa liberté comme la faculté d’agir à sa façon ou comme une domination. Il l’a vécue comme un service. Il a ainsi “rempli” de contenu la liberté, qui autrement resterait une possibilité “vide” de faire ou de ne pas faire quelque chose. Comme la vie même de l’homme, la liberté trouve son sens dans l’amour. Qui est en effet le plus libre ? Celui qui garde pour lui toutes les possibilités de peur de les perdre, ou celui qui se donne “résolument” dans le service et se retrouve ainsi plein de vie en raison de l’amour qu’il a donné et reçu ?

Écrivant aux chrétiens de Galatie, l’Apôtre Paul déclare : “Vous en effet, mes frères, vous avez été appelés à la liberté ; seulement que cette liberté ne se tourne pas en prétexte pour la chair; mais par la charité mettez-vous au service les uns des autres” (Ga 5, 13). Vivre selon la chair signifie suivre la tendance égoïste de la nature humaine. Vivre selon l’Esprit signifie en revanche se laisser guider dans ses intentions et ses actions par l’amour de Dieu, que le Christ nous a donné. La liberté chrétienne est donc loin d’être arbitraire ; elle signifie marcher à la suite du Christ dans le don de soi jusqu’au sacrifice de la Croix. Cela peut sembler paradoxal, mais le Seigneur a vécu l’apogée de sa liberté sur la croix, comme sommet de l’amour. Lorsqu’on lui criait, alors qu’il était sur le Calvaire : “Si tu es le Fils de Dieu, descends de la Croix !”, il démontra sa liberté de Fils précisément en restant sur la croix pour accomplir jusqu’au bout la volonté miséricordieuse du Père. Cette expérience a été partagée par de nombreux autres témoins de la vérité, des hommes et des femmes qui ont prouvé leur capacité de rester libres même dans une cellule de prison et sous la menace de la torture. “La vérité vous rendra libres”. Celui qui appartient à la vérité ne sera jamais esclave d’aucun pouvoir, mais saura toujours se faire librement le serviteur de ses frères.

Que Marie, elle qui a accepté librement de participer à notre rédemption nous obtienne la grâce de savoir nous donner à la volonté de Dieu.

P. Luis Martinez IVE.