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Que faut-il faire pour ne pas avoir de vocations ? “Anti-homélie”

“Anti-homélie” prononcée par le P. Carlos Miguel Buela, le dimanche IV de Pâques, dans le Séminaire « Marie, Mère du Verbe Incarné » (1999).

Aujourd’hui, je veux faire un sermon dangereux. À proprement parler, c’est un anti-sermon, car mon but est d’inciter ceux qui m’écoutent à ne JAMAIS FAIRE ce que je vais dire. D’ailleurs, comme ce sont des temps de dangers et de pièges, pour que je ne sois pas mal compris, et pour ne pas heurter les soupçons, je déclare d’emblée que je ne m’adresse qu’à vous (ceux qui étaient présents ce jour-là) , je ne cherche à accuser personne, ni à faire référence à d’autres institutions, ni a les critiquer. Il est tout à fait approprié que je prononce cette phrase clichée : « toute ressemblance avec la réalité est purement fortuite ».

Mais plus encore. Pour éviter tout malentendu et éviter des effets indésirables et involontaires, je vais m’adresser uniquement au Recteur de notre grand séminaire « Marie, Mère du Verbe Incarné ».

Aujourd’hui, le 4ème Dimanche de Pâques, dimanche du Bon Pasteur, toute l’Église prie pour les vocations. En ce jour, je veux vous dire ce qu’il faut faire, à mon avis, pour ne pas avoir de vocations, c’est-à-dire que je vais vous dire CE QU’IL NE FAUT PAS FAIRE.

A propos du recrutement vocationnel :

Puisque « la vie engendre la vie »[1], la manière la plus efficace d’empêcher l’éveil des vocations de spéciale consécration est de former des communautés sans vie, sans aucun enthousiasme, ce qui se réalise avec une pastorale de simple entretien, qui est la même que la pastorale de “ne pas faire de vagues“. Sans incisivité, sans actualité, sans contact avec les êtres concrets de chair et de sang, de cette époque. Bref, une pastorale nominaliste, de bureau, une pastorale d’attente et non de proposition, une pastorale superficielle qui ne va pas en profondeur, une pastorale qui n’excite pas.

Pour cela, le prêtre ne doit pas être père, il ne doit pas être frère, ni ami, ni pasteur. Ainsi il ne transmettra ni la vie, ni la fraternité, ni l’amour de l’amitié, et il ne donnera pas non plus sa vie pour qui que ce soit. Ce qui s’obtient en n’ayant ni une foi vivante, ni une espérance invincible, ni une charité ardente. C’est ainsi qu’on vivra dans un christianisme triste, sans grands idéaux, bourgeois, formaliste, extérieur. Pas de fruits notables.

Aide beaucoup à effrayer les vocations le fait de présenter les difficultés du ministère sacerdotal et de la vie religieuse comme insurmontables, sans croire que la grâce de Dieu puisse surmonter toutes les difficultés. Beaucoup aide aussi le fait de donner l’impression qu’il faut en être digne pour pouvoir penser à une éventuelle vocation (comme s’il y avait quelqu’un vraiment digne !).

Sur la nature de la vocation :

Ne croyez pas que les vocations consacrées soient l’œuvre de Dieu, mais plutôt l’œuvre des hommes, une simple œuvre humaine. C’est le point crucial. De cette façon, prier pour que Dieu envoie des vocations ne sera pas la chose la plus importante. Tout au plus, certains prieront comme les Messaliens sans fournir de moyens efficaces pour réaliser ce qu’ils demandent. La propagande publicitaire sera privilégiée, même avec beaucoup de mauvais goût, certaines inintelligentes, d’autres ridicules, d’autres irrévérencieuses, d’autres irréalistes, d’autres hilarantes. Je vous propose quelques exemples que vous pouvez prendre en compte :

a) Peut-être pourriez-vous éditer une annonce professionnelle accompagnée de vignettes avec un message « subliminal » comme celui-ci : « Si tu ne sais pas parler (figure d’un bègue) ; si tu penses être jeune (dessin d’un bébé) ; si tu te sens incapable (dessin d’un enfant qui ne sait pas construire une tour avec ses cubes) ; si tu te sens faible (dessin d’un faible allongé sur le sol) ; lié; confus; sans importance (dessin d’une personne cachée dans une poubelle) ; MAIS ! si tu es à la recherche, si tu te soucies des autres et si tu veux donner le plus beau que tu as, VIENS ME SUIVRE ! Signé : Jésus. PENSE-Y! STOP”;

b)  Ou peut-être, pour un meilleur « marketing », vous pouvez essayer cette publicité professionnelle en provenance des États-Unis : «WE’RE LOOKING FOR A FEW STRONG MEN!» (“NOUS RECHERCHONS DES HOMMES FORTS!”). Il y a une photo d’un prêtre portant un jean bleu, avec une casquette rouge, une chemise à carreaux sur une chemise cléricale noire avec un col romain – une condition nécessaire, malgré le ridicule, pour identifier le personnage comme prêtre –, avec ses pieds trempés dans l’eau, ce qui signifie probablement sa fatigue après une longue marche avec ses jeunes campeurs, qui l’assiègent d’en haut, sur le côté… l’un avec un sac à dos, un autre avec une canne à pêche, un autre jouant avec un serpent… Et le prêtre regardant vers le haut, résigné, comme s’il disait : “ce que je dois endurer !”;

c) Ou peut-être avec cet autre : « DIEU AU TÉLÉPHONE ». « Qu’arrive-t-il à ton numéro lorsque Dieu t’appelle ? “OCCUPÉ”. « Plus tard, Seigneur… Je suis occupé maintenant. Quand je finirai. Peut-être demain ». “SANS TIMBRE”. Hors de portée. Débranché. Apathique. Froid. Manque d’éclat “ERREUR”. « Non… Ce n’est pas moi… – mauvais numéro. N’insiste pas. Veuillez raccrocher ». “ON NE RÉPOND PAS”. Sonnerie insistante. Silence. Égoïsme. Surdité pour Dieu. Rejet. “ON A RACCROCHÉ” Non! Coupure avec Dieu. Peine d’amour. Dialogue interrompu. Au lieu de cela, quand Il vous parle, pour quelque raison que ce soit, répondez : « Bonjour… oui, c’est moi. Je t’écoute. Je suis ici. Parle Seigneur. Oui… Oui… comme tu veux, qu’il en soit ainsi, avec plaisir. Pour Toi, mon Dieu, pour ma maison, pour mon pays, pour le monde. À plus tard, Seigneur” ;

d) D’autres publicités présentent des religieux habillés correctement avec leurs habits cléricaux respectifs (soutane, bavoir, crucifix, ou chapelet avec les quinze mystères…), alors qu’en réalité ce sont certains anciens de ces congrégations les seuls à porter encore l’habit propre qu’ils attirent ainsi l’attention et son utilisation parmi les fidèles est si agréable, mais le même habit à été abandonné par les plus jeunes, qui ont préféré une petite croix sur le costume, tout au plus…!;

e) Une autre : “Plus de vie que vous n’auriez jamais imaginé…”. Ci-dessous, une photo vraiment inimaginable de quatre religieuses âgées : l’une jouant du cornet, une autre du violon, une autre de la guitare, une autre de la mandoline. Ensuite, l’invitation : Is God inviting you to consider the … life?» (« Dieu vous invite-t-il à considérer la vie… ? ») ;

f) Et enfin, bien qu’il existe de nombreux autres exemples, un dessin d’un bodybuilder qui pourrait être Silvester Stallone ou un Arnold Schwarzenegger soulevant une barre avec des poids énormes aux extrémités avec les bras tendus et tendus au-dessus de la tête, avec l’inscription suivante : « L’Église a besoin de personnes courageuses et déterminées. Pensez-vous que Christ a dit ces paroles aux personnes faibles ? « Le Royaume de Dieu s’atteint par la force et seuls les forts y entrent. » SI VOUS VOULEZ ACCEPTER LE DÉFI QUE LE CHRIST VOUS PROPOSE, ÉCRIVEZ-NOUS OU VENEZ À:…».

La simple propagande extérieure ne sert pas à grand-chose  pour éveiller les vocations…

Si la vocation n’est pas d’abord l’œuvre de Dieu, il ne faut pas chercher des disciples exclusivement de Jésus-Christ, mais plutôt des disciples de soi-même. Prétendre qu’ils suivent une simple personne humaine est la meilleure disposition pour que personne ne nous suive. Seule la suite exclusive de Jésus-Christ permet à l’homme, homme et femme, de se décider et de persévérer dans une vocation qui dépasse les forces humaines.

Pour ne pas avoir de vocations, on doit présenter la vie sacerdotale et religieuse en rose. Toute consolation et résurrection. Toute joie et compréhension. Tout succès, prospérité et facilité. Ne dites jamais que c’est une croix, puis une croix, et enfin une croix, et toujours une croix ; et que nous devons être prêts à nous crucifier avec Christ, jour après jour, minute après minute. Et qu’il y a beaucoup de quoi s’affliger, peiner et pleurer parce que les prêtres sont « les yeux de l’Église, dont la tâche est de pleurer tous les maux qui frappent le corps »[2].

Pour ne pas avoir de vocation, on doit contraindre les candidats en cherchant indûment à les convaincre qu’ils ont une vocation (même lorsqu’on constate qu’ils ne sont pas aptes). C’est-à-dire avoir un intérêt pour le candidat que l’on constate ne pas être celui de Dieu (car s’il n’a pas l’idonéité, c’est parce que Dieu ne la lui a pas donnée). Et avec caprice, méfiance et subtilité, on ne lui conseille pas fortement de ne pas entrer ou bien sortir du Séminaire le plus tôt possible. Ceux qui n’ont manifestement pas de vocation seront l’occasion pour que beaucoup d’autres la perdent. Et les supérieurs qui ne veillent pas de façon responsable à ce que seuls ceux qui ont une vocation avérée restent, finiront par perdre aussi la confiance des bons dans leur capacité à discerner les vocations, et deviendront aussi une occasion pour des autres de la perdre. Rien, peut-être, ne fait perdre plus de vocations dans les séminaires que des supérieurs lorsqu’ils deviennent des « chiens muets »[3].

Mais, à vrai dire, la coutume la plus répandue est celle de retarder l’entrée, précisément parce que l’on ne croit pas ou l’on doute que c’est Dieu qui appelle. Quand Dieu appelle, il faut une réponse à la manière des Apôtres : Ils quittèrent aussitôt leurs filets et le suivirent (Mt 4,20), et de Saint Paul : …immédiatement, sans demander conseil à la chair ni au sang… ( Gal 1,16). Lorsque les vocations sont destinées à mûrir dans le monde, le monde les avale généralement.

Il y en a même qui disent directement qu’un candidat n’a pas de vocation, non pas parce qu’ils ont vérifié qu’il n’y a pas d’aptitude, mais pour d’autres raisons subjectives. Parce qu’il leur semble, par intuition, parce qu’ils ne sympathisent pas avec le candidat, ou parce qu’ils croient avoir le don « de connaître les cœurs ». S’ils sont jeunes parce qu’ils sont jeunes ; s’ils sont plus âgés parce qu’ils sont très vieux. On connaît le cas d’un jeune prêtre, Jean Luc :

– « Vous pensez avoir une vocation parce que votre frère est prêtre », lui dit un évêque ;

– « Mais je suis entré le premier au Séminaire » ;

– «?!… Soyez un bon laïc».

Il est actuellement le premier prêtre incardiné dans un pays d’Asie centrale.

À propos de la pastorale des vocations :

Continuez à faire ce genre de recrutement ou de prélèvement massif, sans discernement, c’est-à-dire sans faire de sélection. Ou pire encore, avoir un discernement strabique, c’est-à-dire faire une sélection, mais à l’inverse, rejeter les bons et accepter ceux qui n’ont pas de conditions. Certains fixent des limites artificielles, comme l’âge, la profession, les antécédents… et multiplient, sans rime ni raison, les règles d’admission, créant ainsi des obstacles de fait insurmontables. Par exemple:

– «NN. dit qu’il n’est pas nécessaire d’ordonner avant que le candidat ait 28 ans (le Code de droit canonique n’exige que 25 ans), mais je pense qu’il devrait être exigé d’avoir 30 ans car ce n’est qu’alors qu’un candidat peut être considéré comme mûr, et on peut attendre plus longtemps dans sa persévérance.

– « Proposez-vous de faire ce que font les Jésuites ? ».

– «C’est vrai, mec! Quelle formation ils ont!»,

– « Mais, sous le mandat général du Père Arrupe, plus de 12 000 jésuites ont quitté le ministère, tous avaient été ordonnés à l’âge de 30 ans !

– «?!».

Par exemple, certains disent que si un membre de la famille est déjà entré, il ne faut pas en laisser un autre entrer car il est influencé par le premier. Ils ne permettent pas aux cousins ​​germains d’entrer, donc les Apôtres Jacques et Jean, cousins ​​germains du Seigneur, n’avaient pas de vocation apostolique ; ni s’ils sont frères, donc Pierre et André, Jacques et Jean n’avaient pas de vocation apostolique ; d’autres n’acceptent pas les enfants uniques, donc si notre Seigneur demandait aujourd’hui d’entrer dans un séminaire, Il n’y serait pas admis.

Ou de dire sans ambages : « Il n’y aura pas ici de vocations avant trois générations » (Dieu merci, notre Seigneur n’a pas pensé ainsi, ni les Apôtres ; il faudrait encore fonder l’Église).

Ne dites jamais – « ceux de cette Congrégation sont mauvais », parce que vous leur donneriez de la publicité gratuite et qu’ils auront beaucoup de vocations, et alors vous devriez inventer des excuses pour justifier votre stérilité, et diriez : « ils ont une ambiance chaleureuse »…, « ils les attirent avec la musique et le sport…”, “maintenant ils ont l’air bien, mais dans 50 ans…?”, “leur jeunes subissent un lavage de cerveau”, “ils font quelque chose d’étrange, là où ils vont ils ont des vocations et nous n’en avons pas “…

Ce que je vais dire maintenant est infaillible pour ne pas avoir de vocations : que le Séminaire soit rempli de gars « passe-moi le compact de maquillage» ! Lorsqu’ils viendront former un groupe, vous verrez comment les murmures, les rancunes et les ressentiments prolifèrent, vous verrez un climat d’intrigues de palais et de soupçons tordus, ils se piqueront des cils toute la journée, vous les verrez bouger en rythme et murmurer sur tout ce qui croise leur chemin et, puis : Au revoir, mission ! Et ceux qui gardent un peu la droiture de vie partiront et vous n’aurez pas à nourrir 150 séminaristes affamés. Dans certains endroits, ils préfèrent ceux qui sont « masculins, mais pas fanatiques (ceux qui sont trop délicats) » parce qu’ils pensent qu’ils ne causent pas de problèmes et qu’ils peuvent les gérer confortablement, et ils rejettent ceux qui ont de la personnalité, parce qu’ils sont peur qu’ils veuillent outrepasser leur autorité.

À propos de la formation :

C’est peut-être là le point central du problème, comme le disait Jean-Paul II : « …il est nécessaire de trouver une formation adéquate pour ces vocations. Je dirais que la condition d’une vraie vocation est aussi une juste formation. Si nous ne la trouvons pas, les vocations ne viennent pas et la Providence ne nous les donne pas. »[4]

Avoir une équipe hétérogène de formateurs et s’ils ont des tendances opposées, c’est encore mieux, ainsi les séminaristes pourront faire comme le font habituellement les enfants de parents séparés, en demandant la permission de l’un et de l’autre, jusqu’à ce qu’ils obtiennent ce qu’ils veulent. Mais il y a aussi la position inverse, une homogénéité telle qu’elle empêche toute diversité légitime, en mettant tout le monde dans le même moule. L’exclusion des différences légitimes produit toujours des personnes marginalisées, que les autres discrimineront inévitablement et qui finiront par être exclues.

Les supérieurs doivent être distants : qu’ils reçoivent les séminaristes derrière leur bureau. Qu’ils mettent l’accent sur ce qui est purement extérieur et secondaire. Qu’ils mentent, de telle sorte que personne ne les croie et que la coexistence harmonieuse soit détruite. Qu’ils développent au Séminaire un climat policier, d’espionnage, de dénonciation, de différentiation des personnes. Qu’ils soient aigres, de mauvaise humeur. Qu’il faille leur rendre hommage. Qu’ils se méfient de tout le monde puisque la méfiance fait systématiquement disparaître les relations filiales, fraternelles et paternelles, typiques d’un climat familial. D’une manière particulière, pour qu’ils ne vivent pas la vertu de l’eutrapélie, de telle sorte qu’ils soient tous tendus, stressés, comme on dit « grimpant aux murs ». N’encouragez pas le chant, encore moins le chant de joie, et confondez les rôles : à la messe des chants folkloriques, de camp ou profanes ; et au réfectoire, polyphoniques ou grégoriens. Il existe une certaine gnose musicale, qui aide à mélanger les têtes.

Dans la doctrine : installer la conviction que tout est en crise, qu’il n’y a de certitudes sur rien, que tout est discutable, que seule la recherche vaut la peine, mais tant qu’on ne trouve rien, consacrer de grands panégyriques aux idéologies à la mode, au dernier article de théologie paru dans la dernière revue de mauvaise doctrine. Si quelqu’un tombe dans le péché impardonnable d’avoir une quelconque certitude, sans plus tarder, chassez-le, car il est arrogant. La Bible doit être entièrement midrash et doit être démythifiée, c’est-à-dire rien d’historique ou de surnaturel. Pas de métaphysique ni d’esthétique. Que des sentiments et du kitsch, du mauvais goût. Rien de saint Thomas, même s’il est plus élégant de le nommer un peu, donnant l’impression aux jeunes qu’on le connaît. Il n’y a rien de plus explosif que les mélanges gnostiques qui produisent des têtes gnostiques.

Dans le spirituel : travailler pour qu’ils n’aient pas leur propre « moteur », surtout en ne leur donnant pas une authentique spiritualité sacerdotale, seulement, tout au plus, un vernis de spiritualité laïque. Aucun des classiques de spiritualité, mais que ce soit assez et plus que suffisant avec certains des best-sellers syncrétistes à la mode. Qu’il n’y ait pas de discipline sévère, que chacun choisisse l’heure à laquelle il veut se lever, participer ou non à la messe et aux autres actes de prière. Que les exercices spirituels soient partagés entre tous, sans silence et sans pénitence.

La spiritualité sacerdotale étant effacée, ils doivent être accablés de toute la problématique temporelle, qui est responsabilité directe des laïcs. Que l’horizon du surnaturel disparaisse de leur vie. Ainsi ils n’auront plus de raisons valables pour une vocation de consécration spéciale. Pour cela, il est aussi très utile de jouer avec le sacré, de ridiculiser, ironiser, plaisanter avec les choses sacrées : la Bible, la Tradition, le Magistère, les Pères de l’Eglise, les saints Docteurs, la Liturgie, les Saints, la virginité consacrée… tout ce qui est sacré doit être fait peu à peu, occasion de ridicule. Lorsqu’ils sauront jouer avec le sacré, rien ne sera considéré comme sacré et ni leur vocation, ni leur personne, ni leurs promesses ne seront sacrées. Nous devons travailler pour qu’ils ne perdent pas de temps à penser à l’éternité, aux fins dernières, car, comme toute véritable vocation de consécration spéciale, elle est constitutivement entrelacée avec l’éternel, une fois celui-ci enlevé, l’autre disparaît.

Qu’ils n’aident pas spécifiquement les pauvres, car sinon l’option préférentielle pour eux cesse d’être une idéologie et vivre concrètement la charité avec les plus nécessiteux leur donnera un cœur sacerdotal compatissant envers les besoins de leur prochain. Et pour prendre soin de ses pauvres, Dieu vous donnera des vocations et leur persévérance.

D’une manière particulière, nous devons éviter par tous les moyens de leur prêcher sur la présence véritable, réelle et substantielle de Jésus-Christ dans l’Eucharistie, et en particulier sur le fait que l’Eucharistie est un sacrifice. Puisque l’acte principal du prêtre est le sacrifice[5], en supprimant le sacrifice, vouloir être prêtre perd sa raison d’être (c’est pourquoi à notre époque, la seule grande religion monothéiste qui a des prêtres est le christianisme – les catholiques et les orthodoxes sont les seuls qui ont un sacerdoce valide – alors que les juifs et les musulmans n’ont pas de sacerdoce, parce qu’ils n’ont pas de sacrifice ; les rabbins et les muezzins n’ont qu’un office magistral). S’ils n’ont pas une grande dévotion à l’Eucharistie, ils n’ont aucun moyen d’apprendre ce qu’est la charité chrétienne, ni le poids incalculable de l’éternité[6], ni l’audace et la générosité requises pour l’aventure missionnaire de l'”Ite” ( Mc .16, 15-18).

Apprenez-leur une pastorale qui maltraite les gens, les gens simples et fidèles, qu’ils leur fassent sentir l’autorité, qu’ils se méfient de chacun en se disant : « personne ne va me tromper ». Ils ne doivent pas rendre visite aux familles dans leurs apostolats, ni jouer avec les enfants et les jeunes. Toutes les pensées missionnaires doivent être effacées de leurs jeunes cœurs. S’ils n’aiment pas notre peuple, comment vont-ils en aimer d’autres qui, en plus, parlent d’autres langues ?

Apprenez-leur à avoir trop de familiarité avec les filles, pour que se créent des mariages catholiques, dont nous avons plus besoin que des vocations consacrées.

Apprenez-leur que les laïcs doivent remplacer les prêtres et qu’ils le font avec plus de solvabilité. De telle sorte que les rôles se mélangent.[7]

Qu’ils ne sachent pas cuisiner, qu’ils ne lavent pas leurs vêtements, qu’ils ne nettoient pas leurs chambres, qu’ils ne soient pas coiffeurs, ni mécaniciens, ni électriciens, ni ne s’occupent de la ferme, ni ne travaillent dans l’imprimerie… Et il vaut mieux les laisser passer trois mois de vacances chez eux. Mais si vous les obligez à vivre ensemble pendant un mois, que ce soit ennuyeux : pas d’escalade de hauts sommets et de descentes dans des abîmes dangereux, pas de découverte de nouvelles plongées, pas de sports terrestres, nautiques ou aériens comme le font les jeunes du même âge…, ces coexistences deviendront donc phénoménalement ennuyeuses et ne seront qu’une combinaison de boissons, de cigarettes, de lectures d’auteur à la mode au séminaire et des manques de charité. Climat idéal pour faire obstacle aux vocations.

Et expérimentez toujours toutes choses, même les plus évidentes. Bref, les séminaristes sont comme des cobayes. Lorsqu’ils expérimentent de nouvelles choses, surtout s’il s’agit d’utopies, beaucoup resteront sur le chemin.

Enfin, chers Pères, pour ne pas avoir de vocations, vous n’avez pas besoin de prêter attention aux documents du Concile Vatican II qui traitent spécialement de la manière dont doivent être formés de manière globale les futurs prêtres[8] (n’oubliez pas que j’utilise un genre de langage oratoire et littéraire, que l’on pourrait qualifier d’« antiphrastique » !). Ils n’ont pas besoin de prêter attention aux documents pontificaux de Jean-Paul II à cet égard[9]. Pour ne pas avoir de vocations, ils ne doivent pas prêter attention aux documents des Congrégations romaines, par exemple aux documents émis par la Congrégation pour l’Éducation catholique[10]. Ils ne doivent pas non plus tenir compte de ce qui est proposé par les autres dicastères du Saint-Siège[11]. Pour ne pas avoir de vocations, ils doivent ignorer les instructions contenues dans les documents du C.E.L.A.M.[12] . Et ils n’ont pas besoin de prêter attention aux documents de la Conférence épiscopale argentine à cet égard[13].

Lorsque vous allez faire tout cela et que vous devez fermer vos séminaires parce que vous vous retrouvez sans séminaristes, regardez-vous fièrement dans le miroir et répétez plusieurs fois à haute voix, puis répétez-le un nombre incalculable de fois : « Les Grands Séminaires sont une invention du Concile de Trente et ils sont dépassés, ils ne sont plus utiles à notre époque !

Que la Sainte Vierge nous fasse comprendre que nous devons faire exactement le contraire.

+ P. Carlos Miguel Buela IVE.

Fondateur de la Famille Religieuse du Verbe Incarné


[1]Jean-Paul II, Homélie, 10 mai 1981.

[2]Saint Jean d’Avila, Écrits sacerdotaux, BAC, p. 209.

[3]Cf. Isaïe 56, 10.

[4]L’Osservatore Romano, 19 juin 1988, p. 23.

[5]Somme Théologique, 3, 22, 4: «…in sacrificio offerendo potissime sacerdotis consistit officium».

[6]Cfr. 2 Cor. 4, 17.

[7]Ne tenez pas compte, par exemple, de la Congrégation pour le Clergé, Conseil Pontifical pour les Laïcs et autres Dicastères, Instruction sur certaines questions relatives à la collaboration des fidèles laïcs au ministère des prêtres, 15 août 1997.

[8]Décret Presbyterorum Ordinis, sur le ministère et la vie des prêtres (1965) ; Décret Optatam totius, sur la formation sacerdotale (1965).

[9]Saint Jean-Paul II, exhortation apostolique post-synodale Pastores dabo vobis sur la formation des prêtres dans la situation actuelle, 25 mars 1992 ; exhortation apostolique Vita consecrata sur la vie consacrée et sa mission dans l’Église et dans le monde, 25 mars 1996 ; lettre apostolique Les Chemins de l’Évangile, aux religieux et religieuses d’Amérique latine à l’occasion du Ve Centenaire de l’évangélisation du Nouveau Monde, 29 juin 1990.

[10](10) Normes fondamentales de formation sacerdotale (la « Ratio studiorum ») (1970) ; L’enseignement de la philosophie dans les séminaires (1972) ; Lignes directrices pour l’éducation au célibat sacerdotal (1974) ; Formation théologique des futurs prêtres (1976) ; L’enseignement du droit canonique pour les aspirants au sacerdoce (1977) ; Instruction sur la formation liturgique dans les séminaires (1979) ; Lettre circulaire sur certains aspects les plus urgents de la formation spirituelle dans les séminaires (1980) ; Lignes directrices pédagogiques sur l’amour humain (1983); La pastorale de la mobilité humaine dans la formation des futurs prêtres (1986) ; Lignes directrices pour l’étude et l’enseignement de la Doctrine sociale de l’Église dans la formation sacerdotale (1986) ; Lignes directrices pour la formation des futurs prêtres à l’utilisation des instruments de communication sociale (1986) ; Lignes directrices pour l’étude et l’enseignement de la Doctrine sociale de l’Église dans la formation sacerdotale (1988) ; La Vierge Marie en formation intellectuelle et spirituelle (1989) ; Instruction sur l’étude des Pères de l’Église en formation sacerdotale (1989) ; Lignes directrices sur la préparation des formateurs aux séminaires (1994).

[11]Secrétariat de l’Union des Chrétiens, L’œcuménisme dans l’enseignement supérieur (1970) ; la plus récente promulguée conjointement par la Congrégation pour l’Éducation catholique et le Conseil pontifical pour l’unité des chrétiens ; ou le document de la Congrégation pour la Doctrine de la Foi, La Vocation Ecclésiale du Théologien ; le Document de clôture du Deuxième Congrès international des évêques et autres responsables des vocations ecclésiastiques (1981) et Dix ans plus tard (Synthèse) (1992) ; Pottisimus institutionis, du CIVCSVA (1990), Nouvelles vocations pour une nouvelle Europe (1998).

[12]C.E.L.A.M. : Conseil épiscopal d’Amérique latine et des Caraïbes. IIème. Conférence générale de l’épiscopat latino-américain ; Document de Puebla dans les nn. 659-776 ; IVe Conférence générale de l’épiscopat latino-américain, Santo Domingo, Conclusions, nn. 65-93.

[13]Normes pour la formation sacerdotale dans les Séminaires de la République Argentine (1984) ; Formation au sacerdoce ministériel. Plan des Séminaires de la République Argentine (1994)

Le Verbe Abrégé

Le Verbe s’est fait chair

Le signe de Dieu est la simplicité. Le signe de Dieu est l’enfant. Le signe de Dieu est qu’Il se fait petit pour nous. Telle est sa façon de régner. Il ne vient pas avec puissance ni grandeur extérieure. Il vient comme un enfant – sans défense et ayant besoin de notre aide. Il ne veut pas s’imposer par la force. Il nous enlève la peur de sa grandeur. Il demande notre amour: c’est pourquoi il se fait enfant. Il ne veut rien d’autre de nous, si ce n’est notre amour, par lequel nous apprenons spontanément à entrer dans ses sentiments, dans sa pensée et dans sa volonté – nous apprenons à vivre avec lui et à pratiquer aussi avec lui l’humilité du renoncement, qui fait partie de l’essence de l’amour. Dieu s’est fait petit pour que nous puissions le comprendre, l’accueillir, l’aimer. Dans leur traduction grecque de l’Ancien Testament, les Pères de l’Église trouvaient une parole du prophète Isaïe, que Paul citait aussi, pour montrer que les voies nouvelles de Dieu étaient déjà annoncées dans l’Ancien Testament. On pouvait y lire: «Dieu a rendu brève sa Parole, il l’a abrégée» (cf. Is 10, 23; Rm 9, 28)[1]. Les Pères l’interprétaient dans un double sens. Le Fils lui-même est la Parole, le Logos; la Parole éternelle s’est faite petite – si petite qu’elle peut entrer dans une mangeoire. Elle s’est faite enfant, afin que la Parole devienne pour nous saisissable. Ainsi, Dieu nous enseigne à aimer les petits. Il nous enseigne de même à aimer les faibles. De cette manière, il nous enseigne le respect face aux enfants. L’enfant de Bethléem oriente notre regard vers tous les enfants qui, dans le monde, souffrent et qui sont soumis à des abus, ceux qui sont nés comme ceux qui ne sont pas nés…[2]

La Bible entière est résumée en Lui

« Nous sommes ainsi arrivés à la deuxième signification que les Pères ont trouvée dans la phrase: «Dieu a abrégé sa Parole». La Parole que Dieu nous communique dans les livres de l’Écriture Sainte était, au fil du temps, devenue longue. Longue et compliquée, non seulement pour les gens simples et analphabètes, mais même encore plus pour les personnes qui connaissaient l’Écriture Sainte, pour les savants qui, clairement, se perdaient dans les détails et dans les problèmes qui en découlaient, ne réussissant presque plus à trouver une vision d’ensemble. Jésus a «rendu brève» la Parole – il nous a fait voir à nouveau sa plus profonde simplicité et sa plus profonde unité. Tout ce que nous enseignent la Loi et les prophètes est résumé – dit-il – dans les paroles: «Tu aimeras le Seigneur ton Dieu de tout ton cœur, de toute ton âme et de tout ton esprit… Tu aimeras ton prochain comme toi -même» (Mt 22, 37-39). Tout est là – la foi entière se réduit à cet unique acte d’amour, qui englobe Dieu et les hommes… Arrivés à ce point, les deux manières par lesquelles Dieu a «fait brève» sa Parole se rencontrent. Il n’est plus loin. Il n’est plus inconnu. Il n’est plus non inaccessible à notre cœur. Il s’est fait enfant pour nous et il a par là dissipé toute ambiguïté. Il s’est fait notre prochain, restaurant encore de cette manière l’image de l’homme qui, souvent, nous apparaît aussi peu aimable. Dieu pour nous s’est fait don. Il s’est donné lui-même… »[3]

En Jésus-Christ, la Loi ancienne trouve son unité[4]

En Jésus-Christ, qui en était la fin, l’ancienne Loi trouvait par avance son unité. Tout en cette Loi, d’âge en âge, convergeait vers Lui. C’est Lui qui, de la « totalité des Écritures », faisait déjà « l’unique Parole de Dieu ». […][5]

En Lui, les « verba multa » (les nombreuses paroles) des écrivains bibliques deviennent pour toujours «Verbum unum» (l’unique Parole)[6]. Sans Lui, au contraire, le lien se dénoue : de nouveau la Parole de Dieu se fragmente en « paroles humaines » ; paroles multiples, non pas seulement nombreuses, mais multiples par essence, et sans unité possible, – car, ainsi que le constate Hugues de Saint Victor, « multi sunt sermones hominis, quia cor hominis unum non est » (nombreuses sont les paroles de l’homme, parce que le cœur de l’homme n’est pas un)[7]. […]

Le voici donc, ce Verbe unique. Le voici parmi nous, « sortant de Sion »[8], ayant pris chair dans le sein de la Vierge : «Omnem Scripturae universitatem, omne verbum suum Deus in utero virginis coadunavit» (tout l’ensemble des Écritures, toutes ses paroles, Dieu les a réunis dans le sein de la Vierge)[9]. […]

C’est le Verbe “abrégé”

Le voici maintenant, total, unique, dans son unité visible. Verbe abrégé. Verbe «concentré», non pas seulement en ce premier sens que Celui qui est en lui-même immense et incompréhensible, Celui qui est infini dans le sein du Père s’enferme dans le sein de la Vierge ou se réduit aux proportions d’un petit enfant dans l’étable de Bethléem, comme saint Bernard[10] et ses fils[11] aimaient à le redire, comme le redisaient M. Olier dans un hymne pour l’Office de la vie intérieure de Marie[12] …mais en outre et tout à la fois en ce sens que le contenu multiple des Écritures disséminées au long des siècles de l’Attente vient tout entier se ramasser pour s’accomplir, c’est-à-dire s’unifier, se compléter, s’illuminer et se transcender en Lui.

Semel locutus est Deus (Dieu n’ a prononcé qu’une seule parole): Dieu ne prononce qu’une seule parole, non seulement en Lui-même, en son éternité sans vicissitudes, dans l’acte immobile par lequel il engendre son Verbe, ainsi que saint Augustin le rappelait; mais aussi bien, comme l’enseignait déjà saint Ambroise, dans le temps, et parmi les hommes, dans l’acte par lequel il envoie son Verbe habiter notre terre. «Semel locutus est Deus, quando locutus in Filio est» (Dieu n’a prononcé qu’une seule parole, quand il a parlé dans son Fils): car c’est Lui qui donne leur sens à tous les mots qui l’annonçaient, tout est entendu en Lui, et seulement en Lui: «et audita sunt etiam illa quae ante audita non erant ab iis quibus locutus fuerat per prophetas» (et ont été comprises toutes les paroles qui n’avaient pas été comprises auparavant par ceux à qui il avait parlé par les prophètes).[13] […]

Verbe, donc doublement abrégé, puisqu’au moment de son incarnation « Il a récapitulé en lui le long développement de l’histoire humaine, nous offrant, condensé en lui, le salut »[14]. Double abréviation, d’un Verbe qui n’est ainsi ni mutilé ni diminué. Double abréviation, celle de temps et celle d’éternité, qui se rejoignent pour n’en faire qu’une, comme le temps et l’éternité sont inextricablement unis dans ce Verbe abrégé. Double récapitulation, celle de la Parole éternellement prononcée dans le sein du Père et celle de la Parole adressée aux hommes au cours des siècles : la première existe afin de permettre la seconde, et la seconde pour révéler la première, de façon que nous pouvons et devons dire, dans deux sens qui se rejoignent : « Nous avons entendu le Verbe abrégé du Verbe abrégé »[15]. Double abréviation, double récapitulation, mais toujours à partir d’un seul Verbe, ce même Verbe, car Dieu a un seul Verbe dans son sein et Il prononce un seul Verbe au dehors, qui n’est jamais autre que ce même Verbe, ce même Verbe incarné ; de sorte que nous pouvons et devons encore dire, dans deux sens unis : « Dieu a parlé une fois, car il a engendré un seul Verbe »[16]. Double merveille, qui pour nous est donc toujours une, et se manifeste dans un seul trait dans mystère de Noël : « Ô frères, si nous regardons pieusement et diligemment ce Verbe qu’aujourd’hui le Seigneur nous a donné et montré, quelle quantité de choses et avec quelle facilité vous pouvez nous apprendre ! En vérité, le Verbe a été abrégé, de telle sorte que dans ceci s’accomplit toute parole qui cherche le salut, car en cela c’est certainement la Parole qui apporte le salut et qui abrège avec justice. Et cet « accomplissement abrégé répand abondamment la justice » (Is 10, 23)… Mais quelle merveille, si le Verbe de Dieu a abrégé toutes ses paroles, à partir du moment où il a voulu s’abréger et d’une certaine manière se diminuer, à tel point que de l’immensité insaisissable de soi-même Il s’était réduit à la pauvreté du sein et, même tout en contenant le monde, il a toléré d’être contenu dans une mangeoire ? »[17].

Verbe très abrégé mais substantiel

Oui, Verbe abrégé, « très abrégé », – «brevissimum» [18]– mais, par excellence substantiel. Verbe abrégé mais plus grand que ce qu’il abrège. Unité de plénitude. Concentration de lumière. L’incarnation du Verbe est l’ouverture du Livre, dont la multiplicité extérieure laisse désormais apercevoir la « moelle » unique, cette moelle dont les fidèles vont se nourrir[19]. Voici que par le Fiat (qu’il advienne) de Marie répondant à l’annonce de l’ange, la Parole jusque-là seulement « audible aux oreilles », est devenue « visible aux yeux, palpable aux mains, portable aux épaules »[20]. Plus encore : elle est devenue « mangeable » [21]. Rien des vérités anciennes, rien des anciens préceptes n’a péri, mais tout a passé dans un état meilleur[22]. Toutes les Écritures se rassemblent dans les mains de Jésus comme le pain eucharistique[23], et en les portant c’est lui-même qu’il porte en ses mains : « toute la Bible en substance, pour que nous n’en fassions qu’une bouchée…»[24]. «À maintes reprises et sous maintes formes», Dieu avait distribué aux hommes, feuillet par feuillet, un livre écrit, dans lequel une Parole unique était cachée sous de nombreuses paroles: Il leur ouvre aujourd’hui ce livre afin de leur montrer toutes ces paroles réunies dans la Parole unique. Filius incarnatus, Verbum incarnatum, Liber maximus [25](Fils incarné, Verbe Incarné, Livre par excellence): le parchemin du Livre, c’est désormais sa chair; ce qui est écrit dessus, c’est sa divinité. […][26]

​ Voici toute la pureté de l’Évangile ![27] . Saint Jérôme enseigne : « La parole évangélique est abrégée et parfaite ; Au lieu de toutes les cérémonies de la loi composées de tant de pièces, celle-ci nous demande le très bref précepte de l’amour et de la foi, pour que nous ne fassions pas aux autres ce que nous ne voudrions pas qu’ils nous fassent. C’est pour cette raison que le Seigneur dit aussi dans l’Évangile : « Dans ces deux préceptes… » (140 A) »[28] . Moïse avait dit beaucoup de choses et pourtant sa Loi n’avait rien conduit à la perfection définitive [29]. « Verbe abrégé et abrégeant, saint résumé ! [30].

L’amour : essence de la révélation

Toute l’essence de la révélation tient dans le précepte de l’amour ; dans ce seul mot «toute la Loi et les Prophètes»[31]. Mais cet Évangile annoncé par Jésus, ce mot prononcé par Lui, s’il contient tout, c’est qu’il n’est point autre que Jésus lui-même. Son œuvre, sa doctrine, sa révélation, sa parole, c’est Lui! La perfection qu’Il enseigne, c’est la perfection qu’Il apporte. Christus plenitudo legis [32](le Christ, plénitude de la Loi). Il est impossible de séparer son message de sa personne, et ceux qui s’y essayèrent n’eurent pas longtemps avant d’être entraînés à trahir le message lui-même: personne et message finalement ne font qu’un. Verbum abbreviatum, Verbum coadunatum: Verbe condensé, unifié, parfait! Verbe vivant et vivifiant[33]. Contrairement aux lois du langage humain, qui se clarifie en s’expliquant, c’est en paraissant sous sa forme abrégée que, d’obscur, il devient manifeste: Verbe prononcé d’abord «in abscondito» (de façon cachée), et maintenant «manifestum in carne»[34] (manifesté dans la chair). Verbe abrégé, Verbe toujours ineffable en lui-même, et cependant expliquant tout![35] […]

Jésus, Verbe abrége, mais qui mène à la perfection, qui enferme la loi et les prophètes dans le précepte de la charité, divisé en deux… Ô Verbe qui perfectionne et abrège avec justice ! Parole de charité, Parole de toute perfection[36].

Les deux formes du Verbe, abrégé et dilaté, sont inséparables. Le Livre demeure donc, mais en même temps il passe tout entier dans Jésus[37], et sa méditation par le croyant consiste à contempler ce passage. Mani, Mahomet ont écrit des livres. Jésus, lui, n’a rien écrit, – c’est Moïse et les autres Prophètes qui «ont écrit de lui». Le rapport du Livre à sa Personne est donc inverse du rapport qu’on observe ailleurs. Aussi la Loi évangélique n’est-elle point une «lex scripta» (loi écrite). Le christianisme n’est point, à proprement parler, une «religion du Livre»[38]: il est la religion de la Parole, – mais non pas uniquement ni principalement de la Parole sous sa forme écrite. Il est la religion du Verbe, – «non d’un verbe écrit et muet, mais d’un Verbe incarné et vivant»[39]. La Parole de Dieu est maintenant là, parmi nous, «de telle manière qu’on la voit et qu’on la touche»[40]: Parole «vive et efficace»[41], unique et personnelle, unifiant et sublimant toutes les paroles qui lui rendent témoignage[42]. Le christianisme n’est pas «la religion biblique»: il est la religion de Jésus-Christ[43].

Ici s’ouvre enfin une troisième signification de l’affirmation sur la Parole devenue «brève» et «petite». L’homme, pour vivre, a besoin de pain, du fruit de la terre et de son travail. Mais il ne vit pas seulement de pain. Il a besoin de nourriture pour son âme: il a besoin d’un sens qui remplit sa vie. Ainsi, pour les Pères, la mangeoire des animaux est devenue le symbole de l’autel, sur lequel est déposé le Pain, qui est le Christ lui-même: la vraie nourriture pour nos cœurs. Et nous voyons encore une fois qu’il s’est fait petit: sous l’humble apparence de l’hostie, d’un petit morceau de pain. Il se donne lui-même à nous.[44]

+ R. P. Carlos Miguel Buela, IVE.


[1] Cf. Saint Cyprien, Sur le Notre Père, v. 28 ; Cf. LH, III, 411.

[2] Benoît XVI, Homélie à la messe de la veille de Noël 2006.

[3] Benoît XVI, Homélie à la messe de la veille de Noël 2006.

[4] Les paragraphes suivants, jusqu’au 6 inclus, sont tirés de Henri de Lubac, Esegesi medievale. I quattro sensi della Scrittura (vol. III, Jaca Book, Milan, 1996), 258-271. Article paru dans 30 Giorni, n. 12, 2006, 35-38, plus résumé et sans les notes.

[5] Rupert, De S. Spiritu, 1.1, c.6 « Que croyons-nous être la Sainte Écriture, sinon la Parole de Dieu ? Il n’y a qu’une seule Parole de Dieu, l’ensemble des Écritures. Quand nous lisons donc la Sainte Écriture, nous traitons de la Parole de Dieu, nous avons sous les yeux, comme dans un miroir et dans une énigme, le Fils de Dieu» PL, CLXVII, 1575-1576 ; Dans Reg., 1.3, c.14 : « Qu’est-ce que (…) par Moïse et par les prophètes, quelle chose c’était de tisser ensemble la Sainte Écriture, qu’est-ce que la Parole de Dieu, sinon de concevoir dans le cœur, à travers l’esprit prophétique, le Christ, et le faire naître avec leurs bouches?”, 1157 C.

[6] Rupert, In Io., 1.7 « Verbum unum » ; «Les nombreuses paroles qu’il a prononcées sont une seule Parole, « une seule » je dis, puisqu’il s’est lui aussi fait chair. Ce Verbe unique parla avec beaucoup de mots, c’est-à-dire avec de nombreux sons élémentaires et articulés il a mis dans la bouche de nos âmes de nombreux mystères de son incarnation, de sa passion, de sa résurrection et de son ascension » (CLXIX, 494 D). Jérôme, In Eccl, 12,16-17 (XXIII, 1113-1115). Cf. Augustin, In Io., tr. 28, n.9 (CCL, 36, 282-283).

[7] Dans Eccl., h 13 ; PL, CLXXV, 204 D ; h.17 : Parce que l’homme est divisé et devient un autre, de sorte qu’il n’est pas tout un, 237 D.

[8] Prière pour l’Avent, 21 “Ta loi et ta parole, ô Père, sortant de Sion…”.

[9] Sacramentaire lionnais, XIe siècle, « Omnem Scripturae universitatem, omne verbum suum Deus in utero virginis coadunavit » ; «Seigneur, en ce jour, dans le sein de la Bienheureuse Vierge Marie, tu as voulu réunir ton Verbe      …». Rupert, In Is., 1.2, c.31. «Ainsi toute l’Écriture légale et prophétique fut répandue avant que Dieu ne rassemble toute l’Écriture, toute sa Parole, dans le sein de la Vierge. La même Vierge a conçu avant avec l’esprit qu’avec la chair, elle a enfanté avant prophétisant avec la bouche que portant dans le sein. Il est donc faux que le Christ n’ait pas existé avant Marie. En effet, avant de donner naissance à sa chair, la bienheureuse Sion a enfanté par la bouche des prophètes le seul et même Christ, le seul et même Verbe » PL, CLXVII, 1362 BD.

[10] Bernard, In vir. Nat, s.1, n.1 (CLXXXIII, 87 B). In nat. Dom., s.1,n.1 (115 B). In circ., s.1,n.1 (131 D). In annunt.,s.3,n.8 « excelsus, humiliatus ; immensus, abbreviatus” (396 D) V. Lossky, Études sur la terminologie de S. Bernard, in B. du Cange, 17 (1943), 87-90, explique bien ce sens de “abbreviare, abbreviatus” chez Bernard, mais Il n’y a pas ici de « nouveau sens », comme il le croit.

[11] Guerric, De nat., s.5, n.1 (CLXXXV, 43 BD) ; etc. et Eterius et Bernard, Ad Elip., 1.1, c.37 “Les Juifs et les hérétiques qui ne croient pas que le Verbe abrégé, c’est-à-dire fait homme, est le fils de Dieu” (XCVI, 914 D). Absalom, art. 15 (CCXI, 94 B).

[12] « La Mère du Christ, avec une parole, fait chair le Verbe du Père et devient un Verbe abrégé. Et si le sens diminue, en former ainsi le Fils de Dieu, la foi de la Mère suffit. Vie intérieure… (Rome, 1866), 2, 430.

[13] “Et audita sunt etiam illa quae ante audita non erat ab iis quibus locutus fuet per Prophetas.” “Dieu n’a parlé qu’une seule fois, lorsqu’Il a parlé dans le Fils (…) et on a entendu aussi des choses qui n’avaient pas été entendues auparavant par ceux à qui il avait parlé par l’intermédiaire des prophètes”, Augustin, In ps. 61, n.18 (CCL, 39, 786). Ambroise, In ps. 61, n.33 (PL, XIV, 1180 C).

[14] Irénée, Adv. Haer., 1,3, ch. 18, n.1 “Quand il s’est incarné (…), il a récapitulé en lui-même le long exposé fait par les hommes, nous apportant dans un résumé, le salut ” PG, VII, 832 B.

[15] «Verbum abbreviatum de Verbo abbreviato audivimus», Garnerius, S. 5, De nat. Dom. PL, CCV, 599 C.

[16] Semel locutus est Deus, quia unum genuit Verbum, Bernard, De div. S. 73 (183, 695 B). Cfr. In Cant., s.5, n.1 (554 BC). Bède, In Cant (XCI, 1119 C).

[17] Guerric, In Nat. Dom., s.3, n.3 (CLXXXV, 44 CD). Cf. In Purif. S. 2, n.5 (70 D).

[18] Absalom, S. 22, « Celui même est ce Verbe abrégé que le Seigneur a fait sur la terre, encore plus vraiment brévissime. En effet, bien que dans la nature de sa divinité il soit incompréhensible et infini… » (CCXI, 130 C). Comme chez Etherius et Bernard, Jésus est ici le Verbe abrégé par rapport non seulement à l’Écriture , mais surtout à son statut de Verbe éternel.

[19] Rupert, In Io., 1,6 « Les cinq pains de la loi mosaïque, entiers, c’est-à-dire les livres, aussi les deux poissons, c’est-à-dire les prophètes et les psaumes, qui témoignent simultanément de la loi et de l’Évangile… Il porte Ces pains et ces poissons de l’Écriture sur le cou de son serviteur, mais il ne les mange pas, il transpire sous le poids de la lettre, mais il ne touche pas de ses mains ni de ses dents la moelle du contenu spirituel” (CLXIX, 441 D ; cf. 444 CD).

[20] Bernard, Sup. Missus est, h.4, n.11 (CLXXXIII, 86 B).

[21] Élinand, S. 3 (CCXII, 503 B).

[22] Hildegarde, Scivias, 1.1, vis. 5 “c’est pourquoi les anciens préceptes n’ont pas été perdus, parce qu’ils ont été transformés en un meilleur état”, CXCVII, 435 D.

[23] Rupert, ib. «Il a pris le livre et a ouvert le livre (…), c’est-à-dire qu’il a pris toute la sainte Écriture de la puissance de Dieu, pour l’accomplir en lui-même, et naturellement toute la distribution des biens en ce qui concerne notre salut, en la nature humaine par lui assumée, l’ouverture du livre prédit, celle des Saintes Écritures est l’accomplissement (…). “Puis le Seigneur Jésus prit dans ses mains le pain des Écritures, lorsque, selon les Écritures, il s’incarna, souffrit et ressuscita.” CLXIX, 443 CD.

[24] P. Claudel, Apocalypse, 50, a renouvelé, à sa manière, ce thème traditionnel : « Ce verbe dilaté à la mesure de l’Infini, le voici réduit au contact de lui-même dans la main de l’Ange, aux dimensions d’un petit livre, ce n’est plus le grand livre important d’il y a peu, mais c’est plutôt un arrachage ténu des pages et des versets, de la substance de la Bible entière pour que nous puissions en prendre une seule bouchée (…). Cette abréviation, disons-nous, est constituée de ce seul mot que nous donne saint Jean dans sa Lettre : “Dieu est Amour. Et tu aimeras aussi…” (Cf. Ap 10,9-10) C’est l’interprétation de Jérôme. et de Sed. Scot (pp.347-348 et 349).

[25] Garnerius, S. 6 du nat. Dom.

[26] «Dans le passé, Dieu a écrit pour nous un livre dans lequel il n’inclut qu’une seule chose sous de nombreux mots; aujourd’hui, il nous a ouvert un livre dans lequel, sous de nombreux mots, il a renfermé beaucoup de choses» PL, CCV, 609 D; « Lui-même est en effet le livre qui avait la chair comme parchemin et la Parole du Père comme écriture (…). Le plus grand livre est le Fils Incarné, car, de même que par l’écriture la parole est unie aux parchemins, de même par l’assomption de l’humanité la Parole du Père est unie à la chair” (610 A, C) Absalom, S.25 ” Eh bien, le livre dont il a été question… est le Christ ” (CCXI, 148 D). Gerhoh, In ps. 21 (CXCIII, 1015-1016) ; etc. Cf. Héb 1,1.

[27] Jérôme, In Is., 1.1, c.1, v.11″Ensuite, selon le texte hébreu, Dieu ne montre jamais qu’il voulait les victimes offertes par les Juifs, et cela est également lu dans le Psaume 49 (…). Et après avoir réfuté les rites de la Loi Ancienne, il passe à la pureté de l’Évangile et nous dit ce qu’il veut à leur place (…). “Il réfute les sacrifices des victimes et nous enseigne que l’obéissance à l’Évangile est supérieure au sacrifice.” PL, XXIV, 33-34.

[28] Dans Is., l.4, cap.10. G. Beleth, Justification, c.40 “Une fois le symbole récité, à la fin il faut faire le signe de croix, car la parole évangélique n’est pas différente de l’évangile lui-même, mais c’est plutôt une parole abrégée” CCII , 49 D.

[29] Abélard Ep. 7, « Celui qui édicte une loi doit le faire de manière à ne pas multiplier les transgressions par la multiplicité des préceptes. Moïse a promulgué beaucoup de choses et pourtant, comme le dit l’Apôtre, la loi n’a rien apporté à la perfection. Le Christ a donné aux Apôtres quelques préceptes sur la bonté des coutumes et le caractère sacré de la vie et a enseigné la perfection ».

[30] Bernard, De dilig. Deo, c.7, n.21. Glossa in Rom., 9,28-29.

[31] Sed Sc., In Rom. : « En effet, c’est le Verbe de Dieu qui perfectionne et abrège avec justice. Historiquement, on donne cette interprétation: de même que j’abrège une parole et que je la définis immédiatement, ainsi Dieu le mènera à son exécution complète en toute rapidité. Dans la prophétie, en outre, par parole abrégée, on entend le Nouveau Testament, parce que tout y est brièvement compris et conclu (…)». “De Moi, en effet, Moïse a écrit.” « Ou c’est aussi le verbe abrégé de toute la doctrine, de sorte que tout ce que la loi précédente et les prophètes contenaient dans une grande extension de préceptes, le Seigneur en venant dit : Tu aimeras etc. (Mt. 22), c’est ainsi qu’Il abrège évidemment, avec ces deux discours, les prophètes et la loi” (CIII, 93 CD). G. Crispin, Disputatio (Blum. 39).

[32] L. moz. sacram. (517, 622).

[33] Bernard, In Cant., S. 59, n. 9 : « Ô Verbum abbreviatum, attamen vivum et efficax ! », « Ô Verbe abrégé, mais vivant et efficace ». PL, CLXXXIII, 1056 D.

[34] Or. vis.; or. per l’Avvento (32).

[35] Guarnerius, S. 5 de Nat. Dom.: «Le Verbe s’est fait chair. Nous avons entendu le verbe abrégé du verbe abrégé. Mais « tandis que je cherche à être bref, je deviens sombre » (Horace, Art poétique, 25-26), naturellement, car avec la parole courte et sombre nous parlons d’un verbe abrégé et sombre. Ma parole est obscure car elle est abrégée. En vérité, ce verbe parce que sombre est abrégé. En fait, il était obscur avant d’être abrégé et il a été abrégé pour qu’il soit manifeste. Avant qu’il ne soit abrégé, il ne pouvait pas être vu par les yeux de notre esprit, mais lorsqu’il était abrégé, il pouvait être vu par les yeux de la chair. Le Verbe n’existait pas sous forme abrégée et ne pouvait pas non plus être prononcé, le Verbe était abrégé et pouvait être prononcé. Peut-être était-il possible de dire non pas quelle chose était, mais qu’elle était, mais il n’était pas possible de dire quelle chose elle était, mais plutôt quelle chose elle n’était pas… Ô Verbe ineffable et enfant, dont on peut parler ! Ô Verbe ineffable à côté du Père et  Enfant dont on parle à côté de la mère…” PL, CCV, 599 CD. Ib. : C’est pourquoi, de beaucoup de paroles dont la connaissance était longue et incompréhensible, la Sagesse du Père a pris le Verbe abrégé, dont la doctrine est saine et étroite. (605D). Dans ses discours 5 et 6, Guarnerius développe les thèmes du « Verbe abrégé » avec sa subtilité habituelle.

[36] Aereld, De Jesu duod., n. 13 (SC, 60, 76) ; Spéc. charité., l. 1 C. 16 (PL, CXCV, 520 A). Pour le sens de Paul et celui d’Is. 10,22-23, cité par Paul, cf. Huby-Lyonnet, Ép. aux Rom. (1957), 354-355.

[37] Absalom, S. 25 : « Car le livre dont il a été fait mention est Christ. » PL, CCXI, 148 D.

[38] “Le christianisme, religion du livre saint”, dit Curtius (378), qui, parmi les autres, ne consacre que quelques pages à la Bible.

[39] Bernard, Sup. Missus est, h. 4, n.11, faisant parler Marie, “et que ce ne soit pas une parole écrite et muette, mais une parole incarnée et vivante” PL, CLXXXIII, 86 B.

[40] Jn 1; I Jn 1,1-3. Georges Auzou, La parole de Dieu, nuova ed. (1960), 426.

[41] Martin de Leon, S. de J. Bapt.; “La parole de Dieu est véritablement efficace et vivante, c’est-à-dire qu’elle est le Fils de Dieu” PL, CCIX, 18 B.

[42] Cf. Gerhoh, In ps. 19, CXCIII, 961 D. Il reprend le symbole origénien de la transfiguration.

[43] Aujourd’hui, nous parlons volontiers de religion biblique, de pensée biblique, de métaphysique biblique ; Mais même si ces expressions sont légitimes, il ne faut pas oublier qu’elles ne suffisent pas à définir la foi chrétienne. « Verbum abbreviatum » a parfois simplement le sens du symbole de la foi : Or., In Rm, 1.7, c.19, sur Rom. 9,27-33 PG, XIV, 154 A : glose de Rufin(?) Cf. Rufin, Exp. In symb., 1 PL, XXI, 336 B ; Bernard, In Cant., S. 79, 2 CLXXXIII, 1163 C

[44] Benoît XVI, Homélie à la messe de la veille de Noël 2006.