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La douceur de la vérité est éternelle!

Lire l’évangile du Dimanche XVI (Lc. 10,38-42)

Dans la liturgie de la parole des dimanches, il y a toujours une étroite relation  entre la première lecture et l’évangile.

Aujourd’hui, c’est Abraham (dans le livre de la Genèse) qui reçoit trois hôtes mystérieux, trois anges. Non sans raison, L’Eglise a vu en eux, dû à la façon dont le texte les présente, une image de la Trinité. L’auteur inspiré semble jouer avec le singulier et pluriel. Par exemple, lorsque le texte dit : Aussitôt, il courut à leur rencontre (pluriel « leur »), se prosterna jusqu’à terre et dit : « Seigneur (au singulier), si j’ai pu trouver grâce à tes yeux. Peu après : Ils (les trois anges) lui demandèrent : « Où est Sara, ta femme ? » Abraham répondit : « Elle est à l’intérieur de la tente. » Le voyageur (un seul) reprit : « Je reviendrai chez toi dans un an, et à ce moment-là, Sara, ta femme, aura un fils. ».

Dans le nouveau Testament, la lettre aux Hébreux dira en parlant de ce passage : N’oubliez pas l’hospitalité ; quelques-uns en la pratiquant ont, sans le savoir, logé des anges.( 13, 2)

MARTHE_MARIE_INSTITUT_DU_VERBE_INCARNEAlors dans l’évangile de ce dimanche c’est le Christ qui est reçu en qualité d’hôte, le Fils de Dieu qui vient chez ses amis. C’est la maison de Marte, Marie, et Lazare, celui que le Seigneur ressuscitera une semaine avant la Passion. Ils habitaient un petit village, pas loin de Jérusalem, appelé Béthanie.

Saint Luc ne fait pas trop attention à la description de la situation, ce qu’il veut souligner c’est l’enseignement que le Seigneur donne dans ce fait évangélique.

Depuis l’aube de l’Eglise, ces deux sœurs ont été l’image des deux types de vies qu’il y a, la vie active et la vie contemplative (les moines, les moniales).

D’un côté, cela est tout à fait vrai (elles représentent la vie active et contemplative), et ce que nous pouvons déjà dire, c’est que le Seigneur ne dédaigne pas la vie active mais plutôt, dans son reproche plein d’amitié et confiance, Il met Marthe en garde par rapport un problème que nous pouvons avoir tous. C’est-à-dire, oublier que Jésus c’est celui qui veut être le premier à donner, qu’Il a été envoyé à donner pour annoncer le salut et que la meilleure manière de le servir est celle d’écouter et accomplir Sa Parole de salut.

Mais le Seigneur n’oublie pas que Marthe l’a reçu dans sa maison, elle ne s’est pas trompée en servant le Seigneur, seulement elle n’a pas donné l’ordre que cela devait avoir. Méditant ce texte, Saint Augustin veut comme parler à Marthe et il lui dit :

Votre part n’est pas mauvaise, mais celle que Marie a choisie est meilleure. Pourquoi est-elle meilleure ? Parce qu’elle ne lui sera point enlevée. Un jour viendra où vous serez déchargée des soins nécessaires de cette vie, (car une fois entrée dans la patrie, vous n’aurez plus à exercer l’hospitalité envers les étrangers), mais cette part vous sera enlevée dans votre intérêt, et afin que vous en receviez une meilleure. On vous déchargera du travail pour vous donner le repos : Vous naviguez encore, et Marie est déjà arrivée au port, car la douceur de la vérité est éternelle…

Alors, si nous regardons notre réalité, il est vrai que nous cherchons parfois à servir le Seigneur avec nos différentes activités, mais nous oublions de Le servir en laissant sa Parole parler à notre cœur, à travers la lecture de la Bible, des saints et du magistère de l’Eglise. Nous oublions ce que le Seigneur nous dit dans son évangile : Cherchez plutôt son Royaume, et il vous donnera tout le reste en plus. ( Lc. 12,31)

ADICTION_INSTITUT_DU_VERBE_INCARNEDans un monde frénétique  comme le nôtre, il faut une plus grande exigence pour laisser le temps à Dieu. Il faut apprendre encore une fois à contempler, à méditer la Parole de Dieu, à vivre la Parole dans nos vies. La Parole de Dieu doit être notre guide dans les choses à discerner, chaque fois que dans notre vie nous devons par exemple, prendre une décision importante. Combien de fois, malheureusement le critère pour prendre une décision c’est le critère économique, ou bien le « bien-être », laissant de côté bien sûr la vie spirituelle.

Nous constatons que les médias d’aujourd’hui vont, la plus part de cas, contre le silence et la solitude nécessaire pour écouter ce que Dieu dit à mon cœur. On pense que c’est plutôt la jeunesse qui est la plus affectée, mais le phénomène commence à atteindre aussi les gens plus âgés et les petits enfants ; les scientifiques parlent de cela comme de la « cyberaddiction ».

ADICTION_II_INSTITUT_DU_VERBE_INCARNEComment quelqu’un peut-il prier avec sa tête remplie du bruit et des images ? Comment peut-il discerner, sachant que cela demande parfois du temps, celui qui est habitué à taper sur l’ordinateur ou s’asseoir devant l’appareil de télévision, pour recevoir tout déjà élaboré, sans besoin d’effort ? C’est un grave problème, car les critères que beaucoup d’hommes et de femmes utilisent dans leurs vies sont ceux que les médias ont imposés et presque de manière « hypnotique ».

Alors, il est vrai que la prière c’est d’abord un don de Dieu ; mais de notre part, Il exige notre travail, qui implique celui d’enlever tous les obstacles qui empêchent que notre âme communique et parle avec son créateur et Seigneur.

 Il y a un autre fruit que nous pouvons recevoir de la méditation de cet évangile et c’est celui de ne pas mettre en contraposition (en dialectique) l’action (le service) et la contemplation. Soit Marthe, soit aussi Abraham, tous les deux nous donnent exemple d’hospitalité et de service au Seigneur ; mais ils nous apprennent que même dans nos tâches et dans notre travail nous pouvons vivre avec le Seigneur, être en contact avec lui.

ORA_LAVORA_INSTITUT_DU_VERBE_INCARNELe père des moines d’Occident, saint Benoît met au centre de la vie de ses moines cette phrase, « Ora et Labora », « Prie et travaille », avec cela il indiquait que toute la vie doit être imprégnée par l’intimité avec Dieu.

Notre vie de prière ne doit pas se limiter à l’Eglise, ou bien à des  actes de piété déterminés ;  il faut que nous continuions la messe dans nos activités pour ainsi dire, c’est-à-dire prolonger la prière au long de la semaine et de la journée ; savoir offrir ce que je fais, le travail, les soucis de la maison, les petits sacrifices de chaque jour, savoir trouver un moment pour la méditation de la Parole de Dieu et un moment de présence devant Dieu.

Nous devons être capables de nous demander à quel point nous donnons vie à nos activités avec la douce communion avec le Seigneur ?

Le Seigneur est partout ; là nous sommes, Il nous écoute. Il ne faut pas croire que parce que je ne suis pas à l’Eglise, Il n’est pas avec moi ou bien que je ne suis pas obligé à parler avec lui.

Au temps de Sainte Térèse d’Avila, ses sœurs pensaient par fois que les différentes activités du couvent les éloignaient de celle qui est la principale, la prière, ce à quoi la sainte répondait de façon très simple mais très profonde aussi :   SAINTE_THERESE_AVILA_INSTITUT_DU_VERBE_INCARNE

Si c’est à la cuisine, comprenez que le Seigneur se trouve au milieu des marmites (elle disait des « ragoût »); Il vous aide intérieurement et extérieurement.   

A la très sainte Vierge Marie, elle qui écoutait la Parole de Dieu et la méditait dans son cœur, et aux saintes Marthe et Marie, que nous fêtons bientôt, le 29 juillet, nous demandons la grâce d’avoir dans nos vie la primauté de la prière, et que notre prière soit présente à chaque moment de notre vie.

P. Luis Martinez V. E.

Monastère “Bx. Charles de Foucauld”

TEMPS DE CARÊME – LE JEÛNE

Le jeûne est paix du corps, force de l’esprit, vigueur de l’âme

1. « Prescrivez un jeûne. » (Jl 1, 14.) Ces paroles nous les avons entendues à la première lecture du mercredi des Cendres. Elles sont du prophète Joël, et l’Église s’y conforme en prescrivant le jeûne pendant le Carême. Aujourd’hui, la pratique du Carême, fixée par Paul VI dans le Constitution Paenitemini, est notablement adoucie par rapport à ce qu’elle était autrefois. Sur ce point, le Pape a laissé beaucoup de choses à la décision des Conférences épiscopales des différents pays. C’est donc à elles qu’il appartient d’adapter les exigences du jeûne aux circonstances dans les différentes sociétés. Il a rappelé aussi que l’essence de la pénitence du Carême, c’est non seulement le jeûne, mais aussi la prière et l’aumône (les œuvres de miséricorde). Il faut donc, selon les circonstances, voir si le jeûne peut être remplacé par les œuvres de miséricorde et la prière. Dans la vie de l’Église, toujours et partout, le temps du Carême a pour objectif la pénitence, c’est-à-dire la conversion à Dieu. La pénitence, en effet, comprise comme une conversion, une « metanoia », constitue un ensemble que la Tradition du Peuple de Dieu, dès l’Ancienne Alliance, puis avec le Christ lui-même, a lié d’une certaine manière à la prière, à l’aumône et au jeûne.jeûne_institut_du_verbe_incarné

Pourquoi au jeûne ?

Peut-être en ce moment nous vient-il à l’esprit ce qu’avait dit Jésus aux disciples de saint Jean-Baptiste qui lui demandaient : « Pourquoi tes disciples ne jeûnent-ils pas ? » Jésus leur avait répondu : « Les invités à la noce peuvent-ils être en deuil tant que l’époux est avec eux ? Mais des jours viendront où l’époux leur aura été enlevé : c’est alors qu’ils jeûneront. » (Mt 9, 15.) Le temps du Carême, en effet, nous rappelle que l’époux nous a été enlevé. Il a été enlevé, arrêté, emprisonné souffleté, flagellé, couronné d’épines, crucifié… Le jeûne du Carême est l’e xpression de notre solidarité avec le Christ. Telle fut la signification du Carême à travers les siècles ; telle elle demeure aujourd’hui.

« Mon amour a été crucifié et la flamme du désir pour les choses matérielles est éteinte en moi », écrivait saint Ignace, évêque d’Antioche, dans sa lettre aux Romains (Ad Romanos, VII, 2).

2. Pourquoi le jeûne ?

À cette question, il faut donner une réponse plus large et plus profonde pour qu’apparaisse clairement le rapport entre le jeûne et la « metanoia », c’est-à-dire la transformation spirituelle qui rapproche l’homme de Dieu. Nous nous efforcerons donc de nous concentrer non seulement sur la pratique de l’abstention de nourriture et de boisson — tel est en effet communément le sens du jeûne —, mais sur le sens plus profond de cette pratique qui, du reste, peut et doit parfois être « remplacée » par autre chose. La nourriture et la boisson sont indispensables à l’homme pour vivre. Il s’en sert et il doit s’en servir, mais il ne lui est pas permis d’en abuser d’une façon ou d’une autre. L’abstention traditionnelle de nourriture et de boisson a non seulement pour but de donner à la vie de l’homme l’équilibre qui lui est nécessaire, mais aussi de le détacher de ce que l’on pourrait appeler « la mentalité de consommation ». Cette mentalité est devenue aujourd’hui une des caractéristiques de la civilisation et, en particulier, de la civilisation occidentale. « Mentalité de consommation ! » L’homme orienté vers les biens matériels, les multiples bien matériels, en abuse bien souvent. Il ne s’agit pas ici que de nourriture et de boisson. Lorsque l’homme est orienté exclusivement vers la possession et l’usage des biens matériels, c’est-à-dire vers les choses, c’est alors toute la civilisation qui est mesurée selon la quantité et la qualité des choses qu’elle peut fournir à l’homme, et non selon l’homme, à la mesure de l’homme. Cette civilisation, en effet, fournit les biens matériels non seulement pour qu’ils servent à l’homme, à ses activités créatrices et utiles mais, et toujours plus, pour satisfaire et exciter ses sens, pour le plaisir d’un instant, pour des sensations de plus en plus multiples.

On entend dire parfois que le développement excessif des moyens audio-visuels dans les pays riches ne contribue pas toujours à développer l’intelligence, particulièrement chez lejeûne_internet_Institut_du_Verbe_Incarnés enfants. Au contraire, elle contribue à en freiner le développement. L’enfant ne vit que de sensations. Il cherche des sensations toujours nouvelles… et, sans s’en rendre compte, il devient esclave de cette passion d’aujourd’hui. Abreuvé de sensations, il reste souvent intellectuellement passif ; son intelligence ne s’ouvre pas à la recherche de la vérité; sa volonté est enchaînée par des habitudes auxquelles il ne sait pas s’opposer.

L’homme d’aujourd’hui doit donc jeûner c’est-à-dire s’abstenir non seulement de nourriture et de boisson, mais de beaucoup d’autres moyens de consommation, de stimulations et de satisfactions des sens. Jeûner veut dire s’abstenir, renoncer à quelque chose.

3. Pourquoi renoncer à quelque chose ? Pourquoi s’en priver ? Nous avons déjà répondu en partie à cette question. Cette réponse serait cependant incomplète si nous ne prenions conscience que l’homme est lui-même aussi parce qu’il sait se priver de quelque chose, parce qu’il est capable de se dire « non » à lui-même. L’homme est corps et âme. Certains auteurs contemporains parlent de cette structure composite de l’homme en termes de « strates ». Ils parlent par exemple de strates extérieures, à la superficie de notre personnalité, en les opposant aux strates situées en profondeur. Notre vie semble être divisée selon ces strates et elle se déroule à travers elles. Alors que les strates superficielles sont liées à notre sensualité, les strates profondes sont l’expression de la spiritualité de l’homme c’est-à-dire de sa volonté consciente, de sa réflexion, de sa conscience, de sa capacité à vivre des valeurs supérieures.

Cette image de la structure de la personnalité humaine peut servir à comprendre ce que signifie le jeûne pour l’homme. Il ne s’agit pas ici seulement de la signification religieuse, mais d’une signification qui s’exprime à travers l’ « organisation » de l’homme en sujet – personne. L’homme se développe régulièrement lorsque les strates plus profondes de sa personnalité trouvent une expression suffisante, lorsque le cadre de ses intérêts et de ses aspirations ne se réduit pas aux strates extérieures et superficielles, liées à la sensualité humaine. Pour favoriser ce développement, nous devons parfois nous détacher consciemment de ce qui sert à satisfaire la sensualité, c’est-à-dire des strates extérieures, superficielles. Nous devons donc renoncer à tout ce qui les « alimente ».

Voilà brièvement comment doit être interprété le jeûne aujourd’hui.

Renoncer aux sensations, aux stimulants, aux plaisirs, et aussi à la nourriture et à la boisson n’est pas une fin en soi. Cela doit seulement pour ainsi dire aplanir la voie à quelque chose de plus profond dont s’ « alimente » l’homme intérieur. Ce renoncement,cette mortification doit servir à créer dans l’homme les conditions qui lui permettent de vivre des valeurs supérieures dont, à sa manière, il a faim.

Voilà le sens plénier du jeûne dans le langage d’aujourd’hui. Cependant, lorsque nous lisons les auteurs chrétiens de l’Antiquité ou les Pères de l’Église, nous trouvons chez eux la même vérité, souvent dans un langage très « actuel » qui nous surprend. Saint Pierre Chrysologue dit par exemple : « Le jeûne est paix du corps, force de l’esprit, vigueur de l’âme. » (Sermo 7 : De je junio, 3.) Et encore : « Le jeûne est le gouvernail de la vie humaine. Il commande tout le navire de notre corps. » (Ibid., 1.)

Et saint Ambroise répond ainsi aux éventuelles objections contre le jeûne : « La chair, en raison de sa condition mortelle, a ses concupiscences propres. Le droit t’a été donné de les freiner. Ta chair t’est soumise…, ne suis pas les sollicitations de la chair jusqu’à des choses illicites mais freine-les un peu, même dans les choses licites. En effet, celui qui ne s’abstient d’aucune chose licite, n’est pas loin des choses illicites. » (Sermo de utilitate je junii, 3, 5, 7.) Des auteurs non chrétiens expriment aussi la même vérité, qui est universelle. Elle fait partie de la sagesse universelle de la vie.

4. Et maintenant, il nous est certainement plus facile de comprendre pourquoi le Christ, Notre-Seigneur, et l’Église unissent le jeûne à la pénitence, c’est-à-dire à la conversion. Pour nous convertir à Dieu, il est nécessaire de découvrir en nous-mêmes ce qui nous sensibilise aux choses de Dieu, c’est-à-dire aux choses spirituelles, aux valeurs supérieures qui parlent à notre intelligence, à notre conscience, à notre « cœur » (au sens biblique). Pour nous ouvrir à ces choses spirituelles, à ces valeurs, il nous faut nous détacher de ce qui ne sert que la mentalité de consommation, la satisfaction des sens. Dans l’ouverture de notre personnalité humaine à Dieu, le jeûne — au sens tant « traditionnel » qu’ « actuel » du terme — doit aller de pair avec la prière parce que celle-ci nous oriente directement vers lui.

jeûne_esprit_Institut_du_Verbe_IncarnéPar ailleurs, le jeûne, c’est-à-dire la mortification des sens, la domination du corps, donne à la prière une plus grande efficacité, que l’homme découvre en lui-même. Il découvre en effet qu’il est « autre », qu’il est davantage « maître de lui-même », qu’il est devenu intérieurement libre. Et il le découvre dans la mesure où la conversion et la rencontre avec Dieu, par la prière, fructifient en lui.

De ces réflexions que nous avons faites aujourd’hui, il ressort clairement que le jeûne n’est pas seulement le « résidu » d’une pratique religieuse des siècles passés, mais qu’il est aussi indispensable à l’homme d’aujourd’hui, aux chrétiens de notre temps. Il faut réfléchir profondément là-dessus, surtout pendant le Carême.

Saint Jean Paul II

21-03-79