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Comment saint Joseph se rendit à Jérusalem et offrit Jésus à Dieu dans le temple

Quarante jours s’étaient écoulés depuis la naissance du Sauveur à Bethléem ; le moment était venu où Jésus devait être présenté au Seigneur dans le Temple et où Marie, sa mère, devait offrir un sacrifice pour sa purification. En témoignage des droits qu’il avait sur le peuple choisi, soit comme principe de toute paternité, soit parce qu’il avait délivré Israël de la servitude de l’Égypte, Dieu avait voulu non seulement que les Lévites lui fussent spécialement consacrés, mais encore que tout premier-né d’entre les Hébreux lui fût offert et racheté au prix de cinq sicles. La présentation devait se faire par le père trente jours – ou même plus tard – après la naissance de l’enfant (Ex., XIII, 1, 2 ; XXXIV, 19 ; Num., XVIII, 15). Quant à la mère, elle devait, quarante jours après avoir mis au monde un enfant, se purifier de l’impureté légale ainsi contractée, en offrant en sacrifice un agneau, ou, si elle était pauvre, deux tourterelles (Lev., XII, 6, 8). Saint Joseph partit de Bethléem, reconnaissant envers tous ceux qui avaient pu lui témoigner quelque bonté, reconnaissant surtout envers Dieu pour toutes les joies que lui avait apportées la naissance du Sauveur, son adoration par les bergers, sa circoncision. Il traversa de nouveau le plateau de Rephaïm que le printemps commençait à embellir de sa première parure. Autrefois, Abraham avait suivi cette route, lorsqu’il allait immoler son fils Isaac sur le mont Moria. Des hauteurs qui couronnent la vallée de Hinnon, la Sainte Famille aperçut Jérusalem, avec ses murailles crénelées, la puissante ville de David, le Temple et, à l’arrière-plan, le Mont des Oliviers. Joseph, avec l’Enfant et sa mère, passa la nuit dans la ville ou dans l’un de ses faubourgs. Le lendemain, à l’heure du sacrifice du matin, la Sainte Famille se rendit au Temple, et, pour la première fois, le Sauveur contempla, de ses yeux mortels, le sanctuaire de Dieu parmi son peuple, les portiques, les ponts, l’enceinte, le parvis des Gentils par lequel on accédait, par des degrés, à la grande porte de Nicanor.

La Présentation du Seigneur, Fra Angelico.

Là, se trouvait un vieillard, d’un aspect vénérable, qui semblait les attendre. S’avançant à leur rencontre, il s’inclina respectueusement et ouvrit les bras comme pour y recevoir le divin Enfant. C’était Siméon, que l’inspiration de l’Esprit-Saint avait conduit au Temple pour saluer le Sauveur. Marie lui confia l’Enfant. Fra Angelico nous représente le ravissement du saint vieillard : Siméon tient Jésus entre ses bras et le contemple comme on contemple un visage chéri, connu et aimé depuis longtemps. A la vue de la beauté éternellement jeune de ce Dieu qu’il adore, Siméon sent son cœur se rajeunir, ses lèvres s’entrouvrent et il chante ce cantique d’action de grâces que l’Église redit chaque soir pour remercier le Seigneur. Dans les yeux de Jésus, il découvre, dirait-on, une grandiose vision : il lit tous les mystères de l’Homme-Dieu jusqu’au dénouement sanglant du Calvaire En son cantique, tout d’abord il remercie Dieu de ce que son heure est venue et de ce qu’il a pu voir le Salut du monde. Il meurt avec joie, car la vie n’a rien de plus beau à lui offrir. Cet Enfant, – cette Lumière véritable – que ses mains tremblantes élèvent maintenant dans le Temple, il la voit se répandre non seulement sur Israël, mais jusqu’aux îles les plus lointaines et sur les nations païennes. Mais avec tristesse et douleur il reconnaît que cette Lumière sera un jugement, que cet Enfant doit être une pierre d’achoppement et un signe de contradiction pour un grand nombre, même en Israël. Il rend l’Enfant à sa mère à laquelle il prédit de mystérieuses souffrances, sous l’image d’un glaive qui transpercera le cœur et l’âme de Marie.

Sur ces entrefaites, Anne survient. C’était « une veuve, fort avancée en âge » ; « et elle demeurait sans cesse dans le temple, servant Dieu jour et nuit dans les jeunes et dans les prières » (Luc. II, 37). A son tour, elle reconnut en Jésus le Sauveur, le Messie ; sur ses joues pâles et amaigries, dans son regard éteint par les ans, on vit le reflet d’une joie toute céleste. Et « elle se mit à louer le Seigneur, et à parler de lui à tous ceux qui attendaient la rédemption d’Israël » (Luc. II, 38).

Marie et Joseph admiraient dans leur cœur comment, par des témoignages si divers, au ciel et sur la terre, Dieu révélait toujours davantage la gloire du divin Enfant en même temps que les événements caractéristiques de sa vie mortelle. Cette dernière révélation prenait une importance singulière, parce qu’elle avait lieu dans le Temple même, parce qu’elle était faite par des personnages d’une sainteté notoire en présence d’un grand nombre de témoins, parce qu’elle prédisait des destinées exceptionnelles. Mais, en découvrant ainsi l’avenir de l’Enfant, Siméon avait fait au cœur de Marie et à celui de Joseph une blessure qui ne devait plus se fermer. « Qu’en sera-t-il donc de cet Enfant bien-aimé ? » Joseph dut souvent se poser cette question en serrant Jésus sur son cœur, en le voyant grandir sans cesse en grâce et en sagesse. Et ses larmes coulaient, larmes d’amour et de douleur tout à la fois. Peut-être, avant de quitter cette terre, aura-t-il vu le voile s’entrouvrir ! peut-être son regard aura-t-il lu clairement dans l’avenir !

Franchissant la balustrade de pierre qui séparait le Parvis des Gentils du Temple proprement dit, Marie et Joseph gravirent les degrés conduisant à la Porte de Nicanor. Près de là, à droite, se faisaient les rites de la purification pour les femmes après la naissance d’un enfant : elles devaient se présenter au prêtre qui récitait quelque prière et une formule de bénédiction ; et, dès lors, elles avaient de nouveau accès au Parvis des femmes. C’est là, aussi, qu’on voyait ces troncs à l’orifice en forme de trompette, destinés à recevoir les offrandes pour les divers sacrifices et, selon la somme ainsi recueillie, on immolait, après le sacrifice public du matin, un nombre plus ou moins grand d’agneaux et de tourterelles. Marie se soumit à la cérémonie de la purification, comme son Fils s’était soumis à la loi rituelle de la circoncision : dans l’intention du législateur et d’après l’esprit de la loi elle-même, elle n’y était nullement obligée.

A partir du XIIIe siècle, l’art religieux ne manque point de nous montrer saint Joseph présent à la cérémonie de la purification : il porte, dans une corbeille ou dans une petite cage, les tourterelles du sacrifice.

Après cette cérémonie – ou même pendant qu’elle avait lieu – le père offrait son enfant premier-né au Seigneur et le rachetait à prix d’argent : offrande et rachat se faisaient à gauche de la Porte de Nicanor, à la Porte du milieu sur le côté sud du Parvis des prêtres. Selon le rite prescrit, saint Joseph, en sa qualité de père, remit l’Enfant à un prêtre qui, l’élevant entre ses bras et se tournant vers le Saint des Saints, l’offrit au Seigneur et, après le paiement des cinq sicles, le rendit au père en prononçant une formule de bénédiction.

Le Sauveur daigna se soumettre à la cérémonie de la présentation au Temple. Certes, il n’avait pas besoin d’être consacré au Seigneur ou sanctifié : l’union de son humanité sainte avec la seconde Personne de la Divinité le sanctifiait et l’unissait à Dieu mieux que ne pouvait le faire un sacrement ou un rite quelconque. Jamais, sous l’Ancien Testament, sacrifice plus excellent n’avait été offert dans le Temple ; sa grandeur, sa beauté, sa gloire illuminaient le Temple, la terre entière, l’universalité des siècles et faisaient, par leur contraste, ressortir l’indigence et l’insuffisance de l’ancien culte. En ce jour, parce que le Messie venait d’y entrer, le Temple brillait de la splendeur dans laquelle le prophète (Agg., II, 10) l’avait contemplé. Ce sacrifice réunissait en lui seul tous les sacrifices de la Loi ancienne ; par-là, le sacerdoce ancien atteignait l’apogée de sa gloire ; Dieu lui-même accueillit l’offrande plus miséricordieusement encore qu’au jour solennel où Salomon célébra la dédicace du temple. C’était là, sur le mont Moria, que le patriarche Abraham avait offert au Seigneur son fils premier-né ; et, maintenant, voici qu’un autre Abraham, incomparablement plus juste que le premier, incomparablement plus cher à Dieu, renouvelle le sacrifice. C’est saint Joseph ; et Dieu fait de l’Époux de Marie le patriarche de la Loi nouvelle. Si Marie, Siméon et Anne ont accompagné Joseph en cette cérémonie, glorifiant le Seigneur et répétant les paroles du Psalmiste : « Dieu est bon, sa miséricorde est éternelle : au milieu de votre temple nous avons éprouvé votre miséricorde » (Ps. CXVII, 1 ; XLVII, 10), n’était-ce pas en quelque sorte la première procession de la Chandeleur, cette « Fête des lumières », qui a toujours été et qui sera toujours en honneur dans l’Église ?

Saint Joseph, dans la Vie de Jésus-Christ et dans la Vie de l’Eglise

R. P. M. Meschler S. I.

Pour quoi la vie religieuse est utile aujourd’hui?

Fête de la présentation du Seigneur

Nous célébrons ce dimanche la fête de la Présentation du Seigneur. Elle est le souvenir du jour où le Seigneur a été présenté et consacré au Seigneur, tous les aînés du peuple juif devaient être consacrés mais leurs parents pouvaient les racheter en offrant un sacrifice à leur place ; nous devons remarquer que l’offrande que fait Saint Joseph c’était l’offrande que pouvaient faire les pauvres, un couple de tourterelles ou deux petites colombes, car les gens qui avaient une meilleure situation économique devaient offrir un mouton. Cet acte liturgique se faisait quarante jours après la naissance de l’enfant, et pour cela nous le célébrons aujourd’hui, le quarantième jour après Noël.

La commémoration de ce mystère est née très tôt dans l’Eglise et s’est très vite répandue, d’abord en Orient, où elle a reçu le nom Hypapante : « aller au-devant », « rencontrer », car Syméon rencontre le Seigneur. Ensuite, cette fête s’est étendue également à l’Occident, développant surtout le symbole de la lumière, car Jésus est la lumière des nations, et pour cette raison les chrétiens effectuaient comme aujourd’hui encore une procession avec les chandelles, l’origine du terme “Chandeleur”. Par ce signe visible, on veut signifier que l’Eglise rencontre dans la foi celui qui est “la lumière des hommes” et l’accueille avec tout l’élan de sa foi pour apporter au monde cette “lumière”.

Nous donnons un sens spirituel à cette procession. Les cierges symbolisent Notre-Seigneur Jésus-Christ, lumière pour éclairer les nations païennes ; la procession représente et le passage de la sainte Famille dans le Temple et la rencontre des deux vieillards Siméon et Anne.

Saint Anselme, développant ce mystère, nous dit qu’il y a trois choses à considérer dans le cierge comme image du Christ : la cire, la mèche et la flamme. La cire, ouvrage de l’abeille virginale, est la chair du Christ ; la mèche, qui est intérieure, est son âme ; la flamme, qui brille en la partie supérieure est sa divinité.

Depuis l’année 1997, l’Eglise a choisi cette date pour célébrer le jour de la vie consacrée. Une journée dédiée à prier et à réfléchir sur l’appel que Dieu fait à certaines personnes pour Le suivre de plus près, c’est-à-dire, embrasser la vie que le Christ a vécue dans ce monde. La vie consacrée est donc une mémoire vivante du Fils appartenant totalement au Père, qui est vu, vécu et présenté comme unique Amour (c’est cela la virginité), comme unique richesse (c’est cela la pauvreté), comme unique réalisation (c’est cela l’obéissance).

« Qu’en serait-il du monde, s’il n’y avait les religieux ? » se demandait avec raison Sainte Thérèse d’Avila (cf VC 105 a).

C’est une question qu’il est bon de se poser de temps en temps, surtout afin de rendre grâce au Seigneur pour ce don par lequel l’Esprit continue à animer et soutenir son Eglise dans son engagement envers le monde.

Mais nous devons dire que nous assistons dans notre époque à un phénomène très répandu qu’on appelle « l’utilitarisme », c’est-à-dire que les hommes et les femmes d’aujourd’hui (la plupart d’entre eux) considèrent l’utilité d’une chose ou action comme un principe moral. Beaucoup de gens ne se demandent plus si c’est bien ou mal selon la loi de Dieu, mais si c’est utile, donc si c’est utile c’est bien, alors que moralement parlant c’est une mauvaise chose.  Et nous suivons maintenant l’enseignement du p. Carlos Buela, fondateur de la Famille Religieuse du Verbe Incarné, dans son sermon “La vie religieuse, utile ou inutile?” .

«Utile » est actuellement toujours considéré du seul point de vue économique. Ainsi « utile » est cette chose qui produit du profit, du confort ou du résultat ; c’est ce qui peut servir et profiter en sens principalement économique. L’utilitarisme est ce qui ne vise qu’à atteindre l’utilité.

La vie consacrée est donc, du point de vue du monde – le point de vue naturel, humain – une chose inutile, mais du point de vue de la foi – le point de vue surnaturel – c’est quelque chose d’utile et de très utile et ce point de vue c’est l’unique domaine où la consécration à Dieu a vraiment une utilité.

En premier lieu, la vie religieuse est très utile pour la personne même qui se consacre à Dieu. C’est ce que l’apôtre Saint Paul évoque par rapport au vœu de chasteté , ceux qui ne se marient pas avec un esprit chrétien, le font pour se donner à Dieu “propter regnum coelorum”, pour le royaume des cieux (Mt 19, 12). Comme il le dit aussi « Celui qui se marie fait bien ; mais celui qui ne se marie pas fait encore mieux » (1Cor 7, 38).

La pauvreté est très utile pour la personne qui fait ce vœu, qui professe la pauvreté, parce que le vœu de pauvreté nous oblige à nous abandonner totalement à Dieu, faisant entièrement confiance à sa divine Providence qui ne manque jamais à ceux qui l’aiment, car elle dispense d’une manière très belle et très douce ce qui est nécessaire, non seulement pour notre bien spirituel ou éternel, mais aussi pour notre bien temporel et terrestre.

Le vœu d’obéissance est très utile pour l’âme, par lequel le consacré renonce librement à sa volonté et se soumet à la volonté du supérieur, sachant que même au-delà des limitations et des erreurs de chaque être humain, la volonté de Dieu se manifeste dans la vie religieuse par la volonté du supérieur légitime, parce que Dieu l’a voulu de cette manière.

Deuxièmement, non seulement la vie religieuse – en particulier à cause des vœux – est utile à la personne qui la professe, mais également utile à sa famille – avec une utilité surnaturelle, qui est plus importante que l’ économique-. Saint Luis Orione a dit “des familles des consacrés qu’ils se sauvent jusqu’à la troisième et quatrième génération” Et ceci parce que l’aide à travers la prière des personnes consacrées est inestimable pour leurs familles, car la prière est toujours la force de l’homme et la faiblesse de Dieu.

Quand une âme insiste et persévère à demander, Dieu accorde toujours ce que l’on demande ; et s’il ne nous donne pas la chose particulière et spécifique qu’ on lui  demande, il nous donne quelque chose de supérieur et de meilleur, parce que Dieu ne se laisse pas gagner en générosité. Dieu ne nous donne que des choses qui sont pour notre bien, car parfois nous demandons pour nous-mêmes ou pour ceux que nous aimons certaines choses qui, si nous les avions, ne seraient pas pour notre bien.

Troisièmement, les consacrés sont dotés d’une utilité surnaturelle également pour le monde,  non seulement les religieux qui vivent la vie apostolique, mais aussi ceux qui peuvent vivre la vie dite active dans la pratique des œuvres de miséricorde. Une religieuse contemplative, un religieux contemplatif, un moine ou une moniale, font grand bien, car ils enseignent beaucoup de choses au monde !

Il y a des gens qui croient que leur vie est une perte de temps et pourtant ce qu’ils font est le plus important car c’est le premier commandement de la loi de Dieu: aimer Dieu par-dessus tout et les autres comme soi-même pour l’amour de Dieu. Les contemplatifs témoignent que Dieu doit être le premier servi, surtout, dans cette société utilitaire, dans cette civilisation de la consommation, car si Dieu n’est pas le premier servi il n’y aura pas de sens dans la vie de l’homme ou de la femme sur terre ,ils tomberont dans l’absurdité et le non-sens, comme la drogue et tout le reste.

Un contemplatif, une contemplative, lorsqu’ils prient, expient et réparent leurs propres péchés et mais aussi les nôtres.

La véritable âme de la vie contemplative – et chaque religieux doit être contemplatif parce que même si les œuvres de miséricorde appartiennent à la vie apostolique ou active, l’essence de la vie religieuse est la contemplation –  ne s’éloigne pas du monde ou des problèmes du monde. Au contraire, elle les connaît de plus en plus. Un contemplatif, un religieux authentique, par le fait de contempler Dieu, devant qui comme le dit saint Grégoire le Grand, “tout le reste est fait petit”, regarde tout le reste à sa mesure et sait alors donner un sens à toutes les autres choses.

Nous devons prier aujourd’hui et toujours pour les religieux et les consacrés afin qu’ils ne perdent jamais le sens de la foi, le surnaturel, pour qu’ils ne tombent jamais dans le sens du monde car alors ils ne trouveront pas le sens profond de leur vie

Que ce don de leur vie qu’ils ont fait soit toujours avec un cœur sans restriction et sans partage au seul Seigneur qui mérite d’être servi.

P. Luis Martinez IVE.