Lire l’évangile du premier dimanche de l’Avent B (Mc. 13, 33-37)
Nous commençons ce dimanche avec le temps de l’Avent qui nous prépare pour la célébration de la Nativité de Notre Seigneur, le jour de Noël. Au cours de l’Avent, selon le pape Benoît, le peuple chrétien revit un double mouvement dans l’esprit. « D’une part, il élève le regard vers l’obj
ectif final de son pèlerinage dans l’histoire, qui est le retour glorieux du Seigneur Jésus, de l’autre, rappelant avec émotion sa naissance à Bethléem, il s’incline devant la crèche. L’espérance des chrétiens est tournée vers l’avenir, mais reste toujours bien enracinée dans un événement du passé ».
Dans la liturgie de ce dimanche nous pouvons percevoir deux images claires de l’Avent.
Premièrement le prophète Isaïe, qui annonce une triste nouvelle à son peuple, Dieu s’est séparé de son peuple, Il semble l’avoir abandonné. Dieu s’éloigne d’Israël, ce qui fait s’exclamer le prophète : « Seigneur, reviens, ah ! Si Tu déchirais le Ciel, si tu descendais ! »
Quelle est la conséquence pour l’homme ? Il a perdu le contact vital avec Dieu, et il se retrouve hors du bon chemin avec le cœur incapable d’aimer Dieu : Pourquoi laisser nos cœurs s’endurcir et ne plus te craindre ?
Mais, Isaïe ne s’arrête pas dans cette terrible description, il ne s’arrête pas non plus dans le désir de s’en sortir. Il faut retrouver les causes. Qu’est-ce qui provoque cet éloignement de Dieu ? Et le prophète se répond : c’est le péché.
Tu étais irrité, mais nous avons encore péché, et nous nous sommes égarés. Tous, nous étions comme des gens impurs, et toutes nos justices n’étaient que linges souillés[1]. Tous, nous étions desséchés comme des feuilles, et nos fautes, comme le vent, nous emportaient (traînés par les fautes).
Ensemble avec le péché, l’homme tombe dans l’oublie de Dieu : Personne n’invoque plus ton nom, nul ne se réveille pour prendre appui sur toi. Car tu nous as caché ton visage, tu nous as livrés au pouvoir de nos fautes.
En conclusion, Dieu s’est éloigné de l’homme à cause de la faute de ce dernier, et en même temps, l’homme reste livré au pouvoir de sa faute, esclave de son péché.
Cette prophétie, même si elle a été proclamée il y a très longtemps ne laisse d’être très actuelle. Mais pour que Dieu s’approche de l’humanité aujourd’hui, l’homme doit être vigilant, et il doit pour cela avoir l’attitude de cœur et la disposition personnelle à être proche de Dieu. « Comment pouvons-nous nous réjouir- se demande saint Augustin- s’Il est encore si loin de nous ? Loin ? Non. Il n’est pas loin, au moins que tu l’obliges à s’éloigner de toi, aime et tu sentiras qu’Il est proche. Aime et Il viendra habiter en toi ». (Serm. 21, 1-4;CCL 41, 278).
Il y a une deuxième image de l’Avent dans la liturgie de ce dimanche.
Et c’est la vigilance, la veille. Elle est en lien avec l’image du prophète Isaïe, parce qu’elle constitue l’effort concret de rester proche de Dieu et ne pas permettre qu’Il s’éloigne. Elle signifie le fait d’être constamment prêts et disposés à sa rencontre.
C’est ce que le Seigneur veut nous dire avec insistance dans l’évangile de ce dimanche ; par quatre fois Il le remarque : “Prenez garde, restez éveillés, veillez (deux fois)”. Et la dernière phrase est plus qu’éloquente : Ce que je vous dis là, je le dis à tous.
L’important, selon la parabole, c’est la fidélité à la mission confiée et au don qui nous fait capable de l’accomplir. Dieu a fixé à chacun son travail, et demandé au portier de veiller (saint Bède voit en lui l’image des pasteurs de l’Eglise). Alors, cette « maison » est c’est pour certains le ministère, la vocation, la famille, l’ambiance où l’on vit, travaille et se repose. C’est la communauté, le pays, l’Eglise, le monde entier ; nous avons une responsabilité envers eux. Quelle est ma sollicitude envers cette maison ?
« Veillez » nous répète le Seigneur, ce nous traduisons parfois par deux mots : « faites attention » ce qui, comme l’indique le même mot, nous parle de tendre vers quelque chose, d’être orienté vers une réalité avec tout l’esprit.
Dans notre monde d’aujourd’hui, où l’on trouve beaucoup de distractions, il est parfois difficile de fixer notre attention sur un objectif, une valeur et de le suivre avec fidélité et cohérence.
On risque de faire de même avec Dieu, qui se faisant chair est venu jusqu’à nous pour être l’étoile qui oriente toute notre existence.
Nous voyons comment le Seigneur situe cette parabole dans le contexte de la nuit, le verbe indiquant la garde que devait faire le soldat resté comme veilleur. Il attend patiemment que passe la nuit et arrive l’aube du matin. Le prophète Isaïe décrit cela comme un dialogue entre deux veilleurs, symbole de l’utilisation correcte de notre temps : « Veilleur, où en est la nuit ? Veilleur, où donc en est la nuit ? » Le veilleur répond : « Le matin vient, et puis encore la nuit… Si vous voulez des nouvelles, tournez-vous, revenez» (Is 21, 11-12).
Mais notre attente du Seigneur doit aussi se faire dans la paix et la patience. Dieu viendra, et pour cela il nous faut veiller sans nous endormir dans les ténèbres de ce monde. C’est à cela que Saint Jacques exhortait les premier chrétiens : En attendant la venue du Seigneur, prenez patience. Voyez le cultivateur : il attend les fruits précieux de la terre avec patience, jusqu’à ce qu’il ait fait la récolte précoce et la récolte tardive. Prenez patience, vous aussi, et tenez ferme car la venue du Seigneur est proche (Jc. 5,7-8).
Pour que l’épi grandisse ou que la fleur se développe il faut une certaine période de temps que l’on ne peut pas abréger, pour qu’un enfant naisse on a besoin de neuf mois, écrire un livre ou composer une musique requièrent souvent des années d’une patiente recherche. C’est aussi la loi de l’esprit, parce qu’en définitive, le frénétique passera vite sans aucun fruit valable.
Pour cette rencontre avec le Seigneur, il est besoin de patience, purification de cœur, de silence et d’un esprit attentif.
Elle est belle la promesse que nous retrouvons aussi dans la première lecture d’aujourd’hui : « Tu viens rencontrer celui qui pratique avec joie la justice, qui se souvient de toi en suivant tes chemins ». C’est-à-dire Dieu rencontrera comme un ami celui qui est juste.
Gardons-nous de l’esprit frénétique du monde, qui nous pousse à l’oubli de Dieu, pensons à l’essentiel, veillons pour accomplir notre tâche. Comme il est écrit dans le livre de l’imitation du Christ :
« Au jour du jugement on ne nous demandera point ce que nous avons lu, mais ce que nous avons fait ; ni si nous avons bien parlé, mais si nous avons bien vécu. Dites-moi où sont maintenant ces maîtres et ces docteurs que vous avez connus lorsqu’ils vivaient encore, et lorsqu’ils florissaient dans leur science? Oh!Que la gloire du monde passe vite ! »
Demandons la grâce à la très sainte Vierge Marie de nous préparer pour la rencontre avec le Seigneur.
P. Luis Martinez V. E.
Institut du Verbe Incarné
[1] Le mot originel fait référence aux linges utilisés dans la toilette chez les femmes.