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Qu’est-ce que Hallowen et quelle est son origine ?

1. Millénaire de la fête des morts

Le 12 octobre, Jean-Paul II adresse un message à l’évêque français Raymond Séguy, d’Autun, Chalon et Mâcon, et abbé titulaire de Cluny, à l’occasion des cérémonies commémorant le millénaire de la fête des Morts, instituées par saint Odilon, Moine bénédictin et cinquième abbé de Cluny.

Jean-Paul II rappelle que « Saint Odilon voulait exhorter ses moines à prier d’une manière particulière pour les défunts. A partir de l’abbé de Cluny, la coutume d’intercéder solennellement pour les défunts se répand et devient ce que saint Odilon appelle la fête des morts, pratique toujours en vigueur aujourd’hui dans l’Église universelle.

“En priant pour les morts – écrivait le Saint-Père -, l’Église contemple avant tout le mystère de la Résurrection du Christ qui, par sa Croix, nous obtient le salut et la vie éternelle. L’Église espère dans le salut éternel de tous ses enfants et de tous les hommes.

Après avoir souligné l’importance des prières pour les morts, il écrit : « Les prières d’intercession et de supplication que l’Église ne cesse d’adresser à Dieu ont une grande valeur. Le Seigneur est toujours ému par les supplications de ses enfants, car il est le Dieu des vivants. L’Église croit que les âmes du purgatoire “sont aidées par l’intercession des fidèles, et surtout, par le sacrifice propitiatoire de l’autel”, ainsi que “par la charité et d’autres œuvres de piété”.

Enfin, le Pape encourage les catholiques « à prier avec ferveur pour les défunts, pour leurs familles et pour tous nos frères et sœurs décédés, afin qu’ils reçoivent la rémission des peines dues à leurs péchés et qu’ils entendent l’appel du Seigneur. “[1]

2. Du celtique Samain à Halloween, en passant par les défunts

Le 31 octobre au soir, dans les pays de culture anglo-saxonne ou d’héritage celtique, on célèbre la veille de la Toussaint, avec tout un décor qui rappelait autrefois les morts (puis avec l’arrivée du christianisme, les âmes du purgatoire) et qui est maintenant devenue une salade mentale dans laquelle les croyances en sorcières, fantômes et autres ne manquent pas. En revanche, dans les pays de culture méditerranéenne, la mémoire du défunt et l’attention à la mort sont centrées sur le 2 novembre, au lendemain de la célébration de la résurrection et de la joie du paradis qui attend la communauté chrétienne, « une famille de saints » comme saint Paul l’entendait.

Diverses traditions se côtoient, se mélangent et s’influencent en ce début novembre dans les cultures des pays occidentaux. En Asie et en Afrique, le culte des ancêtres et des morts a de fortes racines mais il n’est pas aussi lié à une date précise que dans notre culture.

Un antécédent de cette fête se retrouve chez les Romains qui célébraient les « Lémuries » en mai et pratiquaient divers stratagèmes pour éloigner les fantômes et surtout s’en faire des amis. Les racines de la fête actuelle remontent au 7ème ou 6ème siècle avant Jésus-Christ, lorsque les Celtes, précisément le 31 octobre, célébraient Samain, le nouvel an. Ils croyaient que les morts revenaient sur terre et, pour célébrer leur retour, ils allumaient de grands feux de joie et préparaient de grandes quantités de nourriture. La vieille croyance mêlée de superstitions a atteint les États-Unis et a commencé à faire partie du folklore autonome. La citrouille, ajoutée plus tard, trouve son origine dans les pays scandinaves puis est revenue en Europe et dans le reste de l’Amérique grâce à la colonisation culturelle de ses médias et à l’importation de téléfilms et de films.

Depuis quelques années, elle fait fureur chez les adolescents méditerranéens et latino-américains qui oublient leurs riches traditions pour adopter la calebasse creuse illuminée. A Hallowe’en (de All Hallow’s Eve), littéralement All Hallows’ Eve, la légende anglo-saxonne dit qu’il est facile de voir des sorcières et des fantômes. Les enfants se déguisent et vont – avec une bougie insérée dans une gourde évidée dans laquelle des incisions sont faites pour former un crâne – de maison en maison. Lorsque la porte s’ouvre, ils crient : ‘trick or treat’ (blague ou cadeau) pour indiquer qu’ils feront une blague à celui qui ne leur donnera pas une sorte de pourboire ou de bonus en bonbons ou en argent.

Une vieille légende irlandaise raconte que la citrouille illuminée serait le visage d’un certain Jack O’Lantern qui, le soir de la Toussaint, invita le diable à boire dans sa maison, se faisant passer pour un bon chrétien. Comme il était un homme dissolu, il a fini dans l’enfer.

Avec l’arrivée du christianisme, alors que dans les pays anglo-saxons se dessine le cortège d’enfants déguisés mendiant de porte en porte avec la lanterne en forme de crâne, en Méditerranée d’autres coutumes liées aux 1er et 2 novembre se répandent. Dans de nombreuses villes espagnoles, il y a une tradition d’aller de porte en porte pour jouer, chanter et demander de l’argent pour les « âmes du purgatoire ». Aujourd’hui, bien que moins que par le passé, les cimetières sont toujours visités, les tombes sont ornées de fleurs, les parents décédés sont commémorés et priés pour eux ; dans les maisons on parlait de la famille, de tous les vivants et de ceux qui étaient passés à une autre vie et on consommait des sucreries spéciales, qui durent pour l’occasion, comme en Espagne les beignets de vent ou les os de saint.

Pendant ce temps, de l’autre côté de l’océan et dans le sud des États-Unis, la tradition catholique portée par les Espagnols et les Portugais se teintait de sa propre couleur dans chaque pays américain, mêlée aux rites précoloniaux locaux et au folklore du lieu. Le Mexique est l’un des pays où la fête de la Toussaint a pris plus de force et de couleur.

Beaucoup se déguisent en morts ou portent des masques de crâne et mangent des bonbons en forme de crâne ou de squelette. En ce sens, les évêques de deux diocèses mexicains voisins des États-Unis, Sonora et Sinaloa, ont attiré l’attention sur l’influence américaine qui provoque la perte des traditions indigènes et encourage le consumérisme et l’imitation d’une tradition aujourd’hui plus païenne que chrétienne. L’archevêque d’Hermosillo, José Ulises Macías, a déclaré que “nous, les Mexicains, devons nous enraciner dans nos propres coutumes riches et amusantes, car chaque nation a ses festivités en fonction de ses événements historiques et sociaux”.

Certes, en Galice, deux traditions se rejoignent : la celtique et la catholique, c’est pourquoi c’est la région d’Espagne où la tradition du souvenir des morts dure le plus longtemps, les âmes du purgatoire, étroitement liées au folklore local, et les légendes sur apparitions et fantômes. Dans toute l’Espagne persiste une coutume sacro-sainte qui s’est introduite dans les habitudes culturelles : celle de représenter à cette date une pièce de théâtre liée au mythe de « Don Juan Tenorio ». C’est précisément ce personnage, “le filou de Séville ou l’invité de pierre”, créé par le frère mercédaire et dramaturge espagnol Tirso de Molina, qui a osé se rendre au cimetière cette nuit-là pour évoquer les âmes de ceux qui avaient été victimes de son épée ou de sa possessivité égoïste.

Dans toutes ces représentations, rites et souvenirs, survit un désir inconscient, plutôt païen, d’exorciser la peur de la mort, d’échapper à son angoisse. L’ancien mythe du retour des morts est aujourd’hui devenu des fantômes ou des Draculas à effets spéciaux dans les films d’horreur.

Cependant, pour les croyants, c’est la fête de la Toussaint qui est vraiment pertinente et reflète la foi en l’avenir de ceux qui espèrent et vivent selon l’Évangile prêché par Jésus. C’est ce que soulignait Jean-Paul II dans sa catéchèse du mercredi 28 octobre 1998[2]. Le respect de la dépouille mortelle de ceux qui sont morts dans la foi et de leur mémoire fait partie de la vénération de ceux qui ont été des “temples du Saint-Esprit”.

Comme l’affirme Bruno Forte, professeur à la Faculté de théologie de Naples, contrairement à ceux qui ne croient pas à la dignité personnelle et dévalorisent la vie présente en croyant aux réincarnations futures, le chrétien a « une vision antipode » puisque « la valeur de la personne humaine est absolue. Elle est aussi étrangère au dualisme hérité de Platon qui sépare le corps et l’âme. “Ce dualisme et le mépris conséquent du corps et de la sexualité ne font pas partie du Nouveau Testament pour lequel la personne après la mort continue à vivre tant qu’elle est aimée de Dieu.” Dieu, ajoute le théologien, « n’a pas besoin d’os et d’un peu de poussière pour nous ressusciter. Je veux souligner qu’à une époque de « pensée faible » où l’on prétend que tout tombe toujours dans le néant, il est important d’affirmer la dignité du fragment qu’est chaque vie humaine et son destin éternel »[3].

Miguel A. Fuentes, IVE

Traduction du site : « El Teologo responde »


[1] Zenit, 30 octobre 1998.

[2] https://www.vatican.va/content/john-paul-ii/fr/audiences/1998/documents/hf_jp-ii_aud_28101998.html

[3] Zenit, 30 octobre 1998.

“ils ont lavé leurs robes, ils les ont blanchies par le sang de l’Agneau”

Solennité de Tous les Saints

Ce dimanche, l’Eglise interrompt le cycle des dimanches du temps ordinaire, pour célébrer cette belle solennité de Tous les Saints. 

La solennité de la Toussaint s’est consolidée au cours du premier millénaire chrétien comme une célébration collective des martyrs. En 609, à Rome, le Pape Boniface IV avait déjà consacré le Panthéon, le dédiant à la Vierge Marie et à tous les martyrs. Mais dans tout le monde chrétien de l’époque (soit en orient comme en occident), les églises des différentes nations avaient déjà donné une date précise pour commémorer les saints tous ensemble. Avec le temps, la date s’est déterminée pour ce jour, premier novembre.

Cette solennité nous fait d’abord regarder le Ciel, notre destination commune ; dans le sens que tout homme et femme dans ce monde y est appelé. Mais elle nous fait regarder le monde, de quelle manière doit vivre dans ce monde celui qui est appelé à la vie éternelle du Ciel.

La liturgie de la Parole nous démontre ce qu’on vient de dire à travers les lectures proposées pour cette fête, les deux premières appartiennent au Nouveau Testament, avec comme d’habitude le psaume et l’évangile des Béatitudes, selon saint Matthieu.

La première lecture est tirée de l’Apocalypse de saint Jean. L’apôtre, à travers un tableau d’images symboliques nous décrit l’histoire théologique du monde, de quelle manière Dieu conduit le monde jusqu’au retour de son Fils, en même temps, saint Jean nous fait aussi déjà contempler la réalité du Ciel. Alors, il est évident que, s’agissant des choses d’une telle hauteur, l’auteur de ce livre cherche des images pour nous les faire comprendre. Et pour cela, la façon de lire l’Apocalypse c’est en dépassant la matérialité de l’image et en découvrant la vérité que l’Esprit Saint veut nous apprendre à travers elle.

Le passage du livre de l’Apocalypse que nous venons d’entendre déclare qu’un ange marquera d’un seau le front des serviteurs de notre Dieu, un sceau qui imprime la marque du Dieu vivant.

Et j’entendis le nombre de ceux qui étaient marqués du sceau. D’abord, comment devons-nous comprendre ce sceau ? On vient de dire qu’il ne faut pas tomber dans le matérialisme de l’image. Et pour cela, nous pouvons dire qu’il s’agit d’une image de la grâce, déjà présente aussi dans le langage de la bible, c’est-à-dire, ceux qui sont choisis par Dieu sont marqués, configurés avec le même Christ, par l’Esprit Saint à travers la grâce.

Les marqués par le sceau étaient cent quarante-quatre mille, de toutes les tribus des fils d’Israël. On ne peut pas encore tomber dans l’interprétation matérialiste, défendue (malheureusement) par certaines sectes modernes, qui comprennent cette quantité comme un chiffre exact : « seulement 144.000 personnes seront sauvées » ; on peut dire qu’elle est une interprétation plus que pessimiste et totalement défaitiste, puisqu’une telle quantité ne représente même pas l’infime partie de l’humanité qui au long de toute l’histoire a déjà vécu dans ce monde. De plus, cela ne tient pas compte non plus des paroles de ce même livre qui mentionnera seulement quatre versets plus tard que les sauvés sont une foule que « personne ne pourrait dénombrer »

Il s’agit plutôt d’un nombre symbolique qui indique une foule immense dont Dieu connaît parfaitement la quantité, qui dans les desseins de Dieu est une quantité parfaite (car en Dieu tout est parfait). Ils semblent correspondre à tous ceux qui doivent entrer dans l’Église à travers les âges.

Mais l’image continue avec maintenant ceux qui ont déjà triomphé : une foule de toutes nations, tribus, peuples et langues. Vêtus de robes blanches, avec des palmes à la main.

Saint Jean nous y montre un aspect très clair, Dieu nous donne le salut, comme des vêtements blancs, mais ce sont les bienheureux qui ont lavé leurs vêtements dans le sang de l’Agneau. La rédemption appartient au Christ, mais son effet ne se produit pas automatiquement, c’est la personne qui doit se l’approprier. Son sang et son sacrifice, prix non seulement suffisant mais débordant de notre rédemption, sont à notre disposition ; mais il est inefficace pour ceux qui ne veulent pas en profiter. En pensant à ceux qui meurent de soif en se tenant à côté de la source salvifique, l’Écriture met ces paroles douloureuses sur les lèvres du Messie: «À quoi sert mon sang? (Ps 30.10). Nous devons permettre donc à son sacrifice de nous purifier par notre douleur pour les péchés, en acceptant le Christ par la foi et à travers notre configuration avec lui par la charité transformatrice.

Evoquant les paroles du psaume : « Qui peut gravir la montagne du Seigneur et se tenir dans le lieu saint ? L’homme au cœur pur, aux mains innocentes, qui ne livre pas son âme aux idoles (celui qui fait la volonté de Dieu dans sa vie). Il obtient (donc), du Seigneur, la bénédiction, et de Dieu son Sauveur, la justice. »

Les saints du Ciel que nous célébrons aujourd’hui, ont bien compris ce qu’on vient de dire, ils n’ont pas laissé le Sang du Christ tomber en vain, à travers leurs œuvres, sont venus laver leurs vêtements pour pouvoir accéder à la vie éternelle.

On disait au début que la liturgie nous fait regarder vers le Ciel et vers ce monde. Dans l’évangile nous retrouvons les béatitudes, par elles le Seigneur nous explique quelle est la manière dont le saint vit dans ce monde. 

Le pape Saint Jean Paul II disait que « les béatitudes ne sont que la description d’un visage, le visage de Jésus-Christ. Et pour cela que saint Jean, maintenant dans la deuxième lecture nous rappelle que nous serons semblables au Christ dans la vie éternelle, les bienheureux en vivant l’essentiel de l’évangile décrit par les béatitudes, ont formé l’image du Christ en eux, comme la bible l’exprime aussi, ils se sont habillés du Christ.

Comme le monde du péché est en soi contradictoire au Christ, les béatitudes décrivent donc des situations que le monde n’accepte pas, qu’il résiste à vivre et qu’il considère comme une défaite, comme un malheur ou bien comme une faiblesse. « Voici pourquoi le monde ne nous connaît pas : c’est qu’il n’a pas connu Dieu », écrit saint Jean.

Pour ceux qui vont suivre l’enseignement du Seigneur, il est nécessaire de se détacher de la pensée du monde et d’accepter le dur chemin de la sanctification, comme le Seigneur qui laissant les foules, invite ses vrais disciples à souffrir l’effort de la montée, pour découvrir la nouvelle loi ; seulement pour ceux qui s’approchent de Lui, pour ses disciples authentiques, le Seigneur ouvrira sa bouche pour enseigner la loi de la sainteté, l’évangile résumé.  

Mais pas de promesses de joie, la joie proclamée par les béatitudes est déjà arrivée, c’est maintenant que ce bienheureux possède la joie, même si plusieurs béatitudes réservent une récompense dans le futur : « ils seront consolés, rassasiés, etc. ».

Les béatitudes ne sont pas des promesses dorées d’une gloire future, ce sont plutôt des cris triomphants de bénédiction par une joie permanente et que rien dans ce monde ne pourra enlever.

Ces huit phrases dans leur langue originelle ont été des exclamations, alors que dans les langues modernes cela perd un peu ce sens. Elles étaient des expressions des joies, comme celle qui exprime un désir accompli : Ah ! Comment ils sont joyeux les pauvres d’esprit, quelle joie pour les miséricordieux !

Parce qu’il est vrai, c’est une vérité constatée par une foule immense au long de toute l’histoire de l’humanité, la vie éternelle et la joie du Ciel commencent déjà dans ce monde, lorsque le saint travaille à coup de marteau des béatitudes le visage du Christ qu’il forme en lui et lave déjà son vêtement dans le Sang de l’Agneau de Dieu, en soupirant pour le contempler un jour sur le trône de sa Gloire.

Que la très Sainte Vierge Marie nous conduise un jour devant le trône de son Fils.

P. Luis Martinez IVE.